Posté sur : le vide poches / création
Posté par : jérémy dumont
Auteur : Valérie Duponchelle
L'artiste chinois de Dijon, Yan Pei-Ming, devant son diptyque Obama-McCain chez David Zwirner de New York
L'artiste chinois de Dijon, Yan Pei-Ming, devant son diptyque Obama-McCain chez David Zwirner de New York
Rigueur et lisibilité au programme de cette 35e Fiac qui a misé sur les
ténors américains du marché, soudain dans la tourmente, et sur
l'alliance si parisienne entre l'art moderne et l'art contemporain,
star soudain contestée.
» EN IMAGES - La Fiac au Grand Palais » JEU CONCOURS : le prix Artcurial et «Le Figaro»
Que reste-t-il de nos amours ? La question plane comme une rengaine sur
cette 35e édition de la Fiac (Foire internationale d'art contemporain),
peaufinée comme une recette miracle pour mieux affronter la compétition
internationale par le duo Martin Bethenod, commissaire général, et
Jennifer Flay, directrice artistique. Dégrisés par les nouvelles de la
Bourse, les investisseurs évaluent déjà la décote de leurs derniers
achats au pic du marché - « moins 25 % ? » calculait lundi un grand
nom de l'immobilier - et laissent le champ plus libre aux
collectionneurs de toujours pour lesquels l'art et l'argent ne sont pas
frères de sang.
Paradoxe ? Sous le vent menaçant de la crise financière, le tour de
force, qui était de faire venir à Paris les stars de New York et de
Londres, change brutalement de contexte. Portée par la montée en
puissance de l'art contemporain, cette Fiac 2008 a opté pour une
lisibilité accrue au Grand Palais, qui fait la part belle aux
one-man-show des rois du marché sous nette domination anglo-saxonne. De
Christopher Wool, minimal et abstrait, chez Luhring Augustine, aux
terribles frères Chapman, nourris de Goya et de la contre-culture «
british », chez White Cube. De Joan Mitchell, ode solaire à la
peinture, chez Cheim & Read, à Wilhelm Sasnal, vedette de la scène
polonaise à l'accrochage monastique, chez Sadie Coles. Qui vivra verra ?
Une fois retiré le filet du succès garanti, chacun se retrouve dans les
mêmes starting-blocks à devoir défendre ses choix, ses artistes, ses
partis pris, sa vision de l'art en somme. La promenade en est plus
fraîche, plus personnelle, comme dégagée d'une obligation de résultats.
« Pe ut-être faut-il une énorme purge pour revenir à l'essentiel,
avancer, remettre les pendules à l'heure. L'art est comme la vie. Il y
a des périodes où l'on doit se délester du surplus et chercher qui on
est vraiment », analyse le Bruxellois Xavier Hufkens (Antony Gormley,
Louise Bourgeois et Bertrand Lavier), officiellement « optimiste »
comme nombre de ses pairs.
Une édition bien dosée
Le vent du boulet avait décontracté les plus hautains piliers de la
scène londonienne, la semaine dernière à la Frieze Art Fair. Il donne
des ailes aux visiteurs plus classiques de la Fiac, confortés dans leur
particularité, hier « ringarde », de jauger l'art contemporain au
regard de l'art moderne. Bien dosée grâce à l'exception culturelle
française, cette 35e édition met ainsi en scène Vieira da Silva, reine
des dédales (1908-1992), chez Jeanne Bucher, un sculpteur français
inspiré et oublié, Étienne-Martin (1913-1995), chez Marwan Hoss, un
certain Hans Bellmer (1902-1975), esprit surréaliste, illustrateur de
Bataille et subtil dessinateur, galerie 1900-2000. La confrontation de
Calder, sculpteur à la simplicité magique (1898-1976), et de Martial
Raysse, jeune homme de 72 ans au talent acidulé, attire tout Paris chez
Nathalie Seroussi, qui expose les constructions légères du feu follet
brésilien, Ernesto Neto, dans les structures de feu l'architecte André
Bloch à Meudon.
Les collectionneurs retrouvent spontanément le chemin de leurs coups de
cœur (Bridget Riley, mobile et féérique chez Timothy Taylor). Razzia
immédiate, hier matin, sur le répertoire de Gilles Barbier, fidèle a
son monde ésotérique de mots en bulles et rubans (nouvelle série In the
Soup…, galerie N. et G.-P. Vallois). Ventes en rafale pour les lustres
en fil de fer tranchant et symboliques cristaux de la mer Morte de
l'Israélienne Sigalit Landau (pièces uniques entre 8 000 € et 12 000 €
chez Kamel Mennour), intérêt aigu, grâce à l'exposition « Métamorphoses
» sur l'art contemporain coréen à l'espace Louis-Vuitton, sur la fausse
momie de Jeon Joonho qui contemple l'orage traversant La Crucifixion de
Rogier van der Weyden (50 000 $, édition de 3, chez Thaddaeus Ropac).
Hier matin, les télévisions faisaient la queue pour filmer l'ex- Young
British Artist Marc Quinn, contemporain exact de Damien Hirst, dont les
Kate Moss, en bronze doré ou blanc, les énormes fleurs pétaradantes ont
remplacé les impressionnistes délicats chez Hopkins-Custot pour leur
première Fiac. Beaucoup hurlaient d'indignation, mais les affaires
allaient bon train.
Jusqu'à dimanche soir, au Grand Palais de 12 heures à 20 heures, à la
Cour Carrée du Louvre de 13 heures à 21 heures, et au Jardin des
Tuileries de 7 h 30 à 19 h 30. www.fiac.com