Changer pour rester soi-même
En 2013, Les Tombées de la nuit ont changé de forme, invitant les spectateurs à des temps forts successifs dans des lieux multiples, au-delà de Rennes. C’est pour continuer à faire vivre son projet artistique de départ que les choses bougent.
Aux Tombées, tout part des artistes et de leurs propositions. « On ne se donne aucune limite en terme de famille artistique, explique Claude Guinard, directeur des Tombées de la nuit . Les formes classiques de spectacles sont déjà bien représentées dans la ville, on préfère donc s’en éloigner. » Il ne s’agit pas de traquer la niche à tout prix. « On n’est pas des programmateurs de spectacles. On se demande plutôt comment et où raconter au mieux l’histoire apportée par l’artiste ». Même s’il faut pour cela sortir des cadres.
Le « festival » prend en compte l’endroit où il se trouve. Il jongle avec l’espace, s’appuie, s’inspire ou détourne le territoire pour que l’art y prenne encore plus de sens. Les TDN aiment recycler en « scènes » des lieux de la vie quotidienne « pour que la culture ne reste pas dans sa tour d’ivoire ». L’équipe met la place du spectateur au coeur de ses réflexions. Ici, celui-ci n’est pas en retrait. « On travaille le rapport entre l’oeuvre, le contexte et des spectateurs complices : jusqu’à quel degré peuvent-ils interagir, participer ? » En proposant la performance artistique des Veilleurs de Rennes, qui a impliqué 730 habitants pendant un an, l’équipe a poussé loin cette réflexion. Jusqu’à en revoir le timing des rendez-vous d’été.
Les Tombées de la nuit s’étendent désormais sur plusieurs week-ends en juillet. « On a allongé la durée du festival pour ne pas que l’organisation d’un événement éclipse notre mission d’accompagner des artistes et des projets », souligne Claude Guinard. Plutôt que de proposer 50 spectacles d’un trait, les TDN en offrent une quinzaine par temps fort, qui seront chacun plus visibles. Slow festival. « On ne se limite pas aux spectacles événementiels. Les créations plus légères question budget constituent autant l’ossature de notre projet artistique. »
En multipliant les lieux de son implantation, les Tombées s’invitent maintenant sur la métropole. « Le seul espace de la ville devenait contraignant parce que restrictif, décrit le directeur. Dans d’autres paysages, on peut raconter d’autres histoires, pour d’autres gens ». Il ne s’agit pas de simples spectacles décentralisés, mais de « réfléchir réellement à la circulation et à l’identité territoriale ». Défier la routine n’est pas sans risque : « Pas simple d’accepter de perdre du public, d’aller à la rencontre de nouveaux spectateurs. C’est une leçon d’humilité qui nous repositionne au plus proche des projets artistiques. »