
Le 17 janvier dernier, le Sénat a voté la suppression de l'Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique, dite "Agence bio". Sa dissolution, proposée par le Sénat suite à l’adoption d'un amendement au projet de loi de finances 2025 déposé par Laurent Duplomb, sénateur LR de Haute-Loire, entre en contradiction totale avec les engagements pris par la France dans le cadre du Programme Ambition Bio 2027, qui vise à atteindre 18 % des surfaces agricoles en bio d’ici 2027, contre environ 10% aujourd’hui. En démantelant l’opérateur public chargé du développement de la filière, cet objectif risque de devenir inaccessible, et les efforts consentis par les acteurs d’être réduits à néant.
Un amendement porté par les sénateurs LR, que Annie Genevard, ministre de l'Agriculture, trouve "tout à fait pertinent" mais une "mauvaise idée" pour Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique. Ceci est profondément irresponsable dans un contexte où le développement de l’agriculture biologique représente un enjeu crucial pour l’environnement et la santé publique, une telle mesure va à contre-courant des priorités écologiques et sociétales actuelles.
Affirmer que la suppression de l’Agence bio peut être “tout à fait pertinente” c’est ignorer :
- 40 ans d’engagement pour une agriculture respectueuse de l’environnement, de la santé et de la biodiversité.
- 61 000 fermes bio, soit la 1ère surface bio cultivée en Europe et le 1er vignoble bio mondial.
- 26 000 entreprises certifiées bio.
- 215 000 emplois au service d’un modèle agricole vertueux.
- Plus de 12 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour la filière.
Aujourd'hui 1 agriculteur sur 6 est bio. Depuis 15 ans, l'agriculture biologique a vu ses surfaces multipliées par 5 et les exploitants concernés par 3. Mais, depuis 2 ans, la hausse s'est ralentie. Le nombre de conversions a continué à reculer, alors que le mouvement de déconversion s’est poursuivi. Résultat, en 2023, le solde est encore resté positif, avec un accroissement de 2 % du nombre d’agriculteurs certifiés en bio, qui atteint désormais 61 163. « On a perdu des producteurs de grande culture, mais on a gagné des maraîchers », précise Mme Verdeau de l'agence BIO. source
C'est un enjeu de souveraineté alimentaire. La France est leader européen en production bio avec 2,8 millions d'hectares consacrés au bio, soit 10% de ses terres agricoles, ce qui permet à la France de combiner une consommation à la fois bio et locale. (source).
- 83% du bio consommé en France est origine France Les œufs, le lait et les produits laitiers, le vin, les viandes fraiches en bio sont consommés en origine France.
- Importations : 47 % en valeur provient de l’UE, versus 53 % provenant des pays tiers (stable depuis 2022). Exportations : 59 % part en UE versus 41 % hors UE (stable versus 2022). Le montant a légèrement progressé à 1,058 Mds€ contre 1,050 en 2022, 1,047 en 2021 et 887 M€ en 2020.
- L’export repose toujours sur le vin (56 % des exports, contre 54 % en 2022), les fruits comme les pommes et les noix essentiellement, et les produits animaux (volaille et porc).
- Près des 2/3 des surfaces bio en France sont localisés dans cinq régions (Occitanie 22 %, Nouvelle-Aquitaine 13 %, Auvergne-Rhône-Alpes 11 %, Bourgogne Franche-Comté 9% et Pays de la Loire 9 %).
L'Agence Bio fédère les acteurs du secteur et mène trois missions essentielles : la communication auprès du grand public, la collecte de données stratégiques et le financement des filières. Sa gestion a été saluée par la Cour des comptes, qui recommandait en 2022 un renforcement de ses moyens, et non sa suppression. La suppression de l’Agence Bio menace
- La gestion du Fonds Avenir Bio, essentiel pour plus de 400 entreprises, notamment en Bretagne
- Le seul outil national de promotion des produits bio locale.
- L'Observatoire National de l'Agriculture Biologique, indispensable pour anticiper l'évolution de la filière
- Les efforts pour atteindre 20 % de bio dans la restauration collective
- Un lieu de concertation unique pour toute la filière
Cette proposition a été mise sur la table dans le cadre de la loi de finances dans l’objectif d’économiser 2,9 millions d’euros par an, soit 0,0004 % du budget de l’État. Or il faut savoir que le budget du lobby officiel des pesticides (Phytéis) est SUPERIEUR au budget de l'Agence bio : 4 millions d'euros faire du lobbying auprès des élus à la recherche de voix. On vit dans une démocratie où nos impôts doivent payer une Agence bio à 2,9m€ par an pour légèrement compenser l'hégémonie d'un lobby des pesticides qui dicte ses lois au ministère de l'agriculture (7000 millions d'euros de budget annuel pour info, hors PAC) Source
Loin de générer des économies, cette décision va entraîner des coûts supplémentaires pour la société et l’environnement. le modèle agricole actuel coûte cher : pour 100 euros de nourriture vendue, les coûts environnementaux et sociaux cachés et les mauvaises habitudes alimentaires coûtent 130 euros à la société (calcul ITAB sur chiffres FAO). L’ITAB passe en revue d’articles scientifiques rapportant une amélioration de sols dans 70 % des cas, une biodiversité accrue de 20 % à 30 %, des émissions de gaz à effet de serre réduites de 50 % (https://lnkd.in/eHqzDb52). Encore plus scientifique, en accès libre : https://lnkd.in/eB65Qc5c.
Ainsi, l’agriculture biologique est un pilier de la transition écologique, offrant des solutions concrètes pour réduire l’usage des pesticides, et ainsi protéger les écosystèmes naturels et la santé des agriculteurs. Le rapport du 30/6/22 de la Cour des comptes, qui alerte sur l’insuffisance de la la politique de soutien à l’agriculture biologique, rappelle les bénéfices de l’agriculture bio notamment en termes de santé et d’environnement, et observe que le développement de l’agriculture biologique est le meilleur moyen de réussir la transition agro-environnementale et d’entrainer les exploitations agricoles dites conventionnelles vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement. (source)
Alors que la biodiversité décline à un rythme supérieur en milieu rural, le maintien et le développement de pratiques agricoles durables sont plus que jamais nécessaires. En mai 2023, une étude du CNRS a mis en évidence la disparition des oiseaux des champs en Europe, qui ont perdu 60 % de leurs effectifs en à peine quarante ans. Au-delà des oiseaux, c’est toute la chaine du vivant qui s’est effondrée dans nos campagnes, victime des pesticides, du remembrement et de la mécanisation à outrance. A l’inverse, les parcelles cultivées en agriculture biologique comptent 20% de diversité d’espèces en plus et 30% d’individus en plus. En juin 2024, la LPO a signé un partenariat avec la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB) afin de porter ensemble des actions communes en faveur de la biodiversité et de l’agriculture biologique.
On peut aussi mentionner le volet "BioNutrinet" du programme scientifique français Nutrinet Santé : en suivant depuis 2014 une large cohorte (env. 50 000 personnes), les résultats préliminaires indiquent que les gros consommateurs de bio ont des risques très significativement réduits de diabète, obésité, cancers, maladies cardiovasculaires... (y compris en tenant compte d'autres paramètres comme l'activité physique, la cigarette...). L'effet est particulièrement marqué chez ceux qui consomment plus de produits végétaux non transformés. Ce programme scientifique français est une première mondiale par son ampleur, sa durée et le nombre de paramètres étudiés.
Concernant la qualité nutritionnelle des produits Bio, le nombre d’études validées scientifiquement est très variable selon les catégories d’aliments et nutriments ciblés. Par exemple, de nombreux résultats au sujet des teneurs en antioxydants dans les fruits et légumes sont publiés alors que les données relatives aux glucides dans les produits céréaliers restent plus limitées. De récentes méta-analyses confirment cependant des tendances observées depuis une dizaine d’années (Sources : Nutrifizz, agence de conseil en nutri-valorisation).
- Plus de polyphénols, caroténoïdes et vitamine C mais moins de vitamine E, fibres ou protéines dans les fruits & légumes, produits céréaliers et graines oléagineuses Bio en comparaison aux produits conventionnels (Baranski et al. 2014)
- Un meilleur profil lipidique (plus d’acides gras oméga 3, rapport 6/3 plus faible) mais une plus faible teneur en iode du lait Bio vs. conventionnel (Srednicka-Tober et al. 2016) ;
- Un meilleur profil lipidique (plus d’acides gras oméga 3, moins de saturés) et plus de fer au sein des produits carnés Bio (Srednicka-Tober et al. 2016)... (Article complet dans Actif's Magazine n°61)
Il est vrai toutes fois que la réduction des assortiments de produits bio dans les rayons des GMS a continué en 2024 (-7 %). Mais il est a noter que les distributeurs enregistrent un retour à la croissance de l’ordre de 8 %. Ce qui signifie que les consommateurs ne trouvant plus leurs produits BIO dans leur magasin généraliste se tournent vers des enseignes BIO. Source
54% des Français déclarent avoir consommé des produits alimentaires biologiques au moins une fois par mois. La consommation de produits bio est très nettement liée aux niveaux de revenus et de diplôme. Ainsi, la moitié des Français disposant d’un diplôme Bac +4 ou supérieur consomment des produits bio au moins une fois par semaine (Agence Bio, 2024). La consommation régulière de produits alimentaires biologiques est très corrélée aux effets de l’alimentation sur la santé mais aussi aux sensibilités aux enjeux environnementaux.
Si les intentions d'achat sont en recul ces dernières années c'est en grande partie pour des raisons économiques, mais aussi des doutes qui portent sur "les produits bio sont vraiment bio ?".
Ce que souhaitent les consommateurs c'est un engagement au-delà du bio et une transparence sur les impacts. C'est à dire non seulement des produits sans pesticides et engrais (donc bons pour la santé) mais des produits qui contribuent à la santé, à l'environnement et aux producteurs locaux.
- Les produits certifiés ROC qui affichent ces contributions socio environnementales surperforment aux USA (source).
-,En France le planet-score en quadruple A vise la régénération avec un effet sur les ventes prouvé (en combinaison avec le label bio et le ntutri score. Le Collectif En Vérité a dévoilé les résultats de sa dernière étude consommateurs menée par Appinio et avec le soutien de Médiaperformances sur l'affichage intégral harmonisé, en présence de ses adhérents, journalistes et invités politiques ! source
Avec les lauriers de la régénération nous avons montré que la régénération se traduit dans des innovations à impact contributif dans plusieurs secteurs d’activité en France. Des produits et services économiquement viables. Des produits pas toujours en bio mais sans pesticides et qui ont adopté un affichage environnemental comme par exemple le planet-score pour viser la régénération et/ou ayant adopté d'autres bonnes pratiques régénératives comme par exemple au niveau de leur gouvernance ou de l'inclusion des parties prenantes humaines et non humaines Lauréats 2024
Il est clair que le bio apparait aujourd'hui comme le seul label de confiance pouvant porter la révolution du bio vers le bio régénératif. Encore faut il que la bio fasse sa révolution avec une approche globale de bout en bout de sa chaîne de valeur, des agriculteurs aux consommateurs.
En attendant que l'agriculture bio fasse sa révolution agissez pour le maintien de l'agence BIO :
Vous pouvez signer la pétition d'agir pour l'environnement :
https://soutien-agencebio.agirpourlenvironnement.org/
Si vous voulez témoignez de votre mécontentement aux parlementaires qui vont statuer sur le sort de l'Agence bio c'est par ici https://shaketonpolitique.org/interpellations/supression-agence-bio/
Vous pouvez aussi soutenir l’OFB et sa police de l’environnement qui est aussi mal menée. https://www.aspas-nature.org/soutenons-lofb-et-sa-police-de-lenvironnement/
Enfin vous pouvez soutenir notre association avec un don ICI.
Lauriers et coups de coeur #lauriers2024