Très longtemps, nous avons pensé que les capacités permettant de penser, se représenter, mais également d'imaginer et d'inventer caractérisaient l'Homme car on ne les trouvaient à priori chez aucun animal à ce degré de développement.
Mais saviez-vous que certains poissons coralliens façonnent des oeuvres d’art au fond de l’eau ? Que les fourmis cultivent des champignons ? Que le corbeau calédonien fabrique des pics à brochette ? Que les loups redessinent le paysage aux États-Unis ? Que les cygnes partent en campagne politique ?
En lisant "La Cigale et le zombie. Ces comportements que l'on pensait propres à l'Homme" de François Verheggen, on apprend que le rire, l’enseignement, les activités collaboratives, les soins parentaux, la guerre, l’empathie, l’adultère, le divorce, la politique, etc. ne sont pas spécifiques aux comportements humains
Notre façon de penser de l’humain en est impactée et émerge en sociologie la notion de non-humain notamment développée par les sociologues Bruno Latour et Michel Callon. Cette méthode sociologique consiste à décrire les relations avec les acteurs non-humains avec une focale « multi-espèces » qui inclue les humains dans celles ci.
Tantôt l’expression "non-humains" désigne ce qui est radicalement autre que l’humain – c’est-à-dire tout ce qui est à l’exception de ce qui est humain : elle sert ainsi à qualifier le rôle des animaux, des plantes, etc. dans le champ social.
Tantôt l’expression désigne ce qui ne peut à proprement parler être réduit à l’humain mais qui ne l’exclut pas pour autant – c’est-à-dire ce qui ne relève simplement pas de l’opposition humain/autre-que-l’humain : l’expression sert ainsi à qualifier l’ensemble des êtres dits « hybrides » qui se situent en quelque sorte sur la frontière de l’humain et de l’autre-que-l’humain, d'après Camille Chamois " Humains et non-humains : enjeux philosophiques d’une question anthropologique".
Dans "Le Règne animal", le monde est justement en proie à une vague de mutations qui entraînent la transformation progressive de certains humains en animaux. Les transformations sont lentes et les créatures ne perdent que progressivement leur humanité. Véritable parabole du multicentrisme, le film questionne l’animalité de l’homme, la monstruosité et la peur de l’autre, et s’interroge sur la possibilité de cohabiter, la tolérance et la solidarité.
Parmi la bonne vingtaine de créatures qui surprennent le spectateur, une a un rôle-clé : Fix, un homme-oiseau interprété par l’acteur Tom Mercier. « J’avais en tête [le chanteur de Placebo] Brian Molko jeune : un personnage emo [punk], androgyne, à la fois enragé et brisé.
Alors à quoi ressemblera le monde des non humains ? Des designers ont imaginé de délicieux champignons qui fleurissent à la suite d'une catastrophe écologique, des cultures microbiennes dont la production surpasse les cultures agricoles, une habitation partagée avec des chauves souries et un parc de jeu pour les humains et les écureuils...
Le design non humain nécessite de se « décentrer » de la seule perspective des humains sur les façons de vivre sur terre, pour observer d'autres façons de manger, s'habiller, se déplacer ,dormir, habiter...
Le design non humain est différent du biomimétisme dans le sens ou l'observation vise la compréhension des usages et pratiques "autres" sans chercher à reproduire les enseignements dans le monde humain.
Sa visée est de chercher comment mieux vivre ensemble sur terre alors que nos destinées sont liées dans des écosystèmes fragilisés qui mettent le vivant dans son ensemble en danger.
On peut l'appeler Design Régénératif.
Pour aller plus loin : - Les imaginaires de l'écologie, - la fresque des imaginaires - les 4 relations à la nature - L'architecture régénérative
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