Suite du leadership régénératif avec un focus sur la tendresse comme force mettant en capacité le vivant dans les entreprises et la société.
Ce n’est que récemment que les émotions ont pu obtenir reconnaissance dans le milieu professionnel. Exclure la question de l’émotion dans l’entreprise, c’est exclure la notion même d’humanité en un sens alors que les enjeux humains sont déterminants dans la performance des organisations.
L'intelligence émotionnelle est une dimension importante dans le leadership régénératif non pas juste pour développer son empathie ou s'épanouir dans des relations plus instinctives mais justement dans la tendresse pour soi, pour les autres et la nature.
Et son rôle principal est de développer une culture régénérative qui permet à chacun de prendre soin des autres.
Pour être un bon leader, il faut avant tout aimer les gens. "Vous devez aimer ceux que vous dirigez avant de pouvoir être un leader efficace. Vous pouvez certainement commander sans amour mais vous ne pouvez pas les guider sans amour. Et sans leadership, le commandement est une expérience creuse, un vide souvent rempli de méfiance et d'arrogance". Général Eric Shinseki - ancien chef d'état-major de l'armée américaine. L’intelligence émotionnelle est donc fondamentale au leadership. « Ce n'est pas le diplôme qui fait le manager, c'est le cœur ». Jean-Michel Frixon, retraité et ex-ouvrier de Michelin, auteur de "L'ouvrier qui murmurait à l'oreille des cadres" a réussi à faire évoluer les pratiques managériales au sein de la multinationale. « Quand vous avez obtenu la considération et le respect des gens, vous avez une armée derrière vous, c'est aussi simple que ça. » Source Ainsi, un bon leader doit aimer les gens, et comme dit dans la note de la semaine dernière, ce qui distingue le leadership régénératif c'est de porter la même attention aux non humains qu'aux humains.
Pourtant l'amour est souvent cité avec distance dans le milieu professionnel. Ainsi les termes utilisés qui vont du management "bienveillant" à l'entreprise "altruiste" n'évoquent pas la tendresse qui est pourtant ce que l'on ressent quand est on est en empathie avec les autres. Alors qu'aimer est une attitude connue pour renforcer la créativité, engendrer un climat nourrissant dans lequel peuvent émerger des pensées nouvelles, délicates, expérimentales, et des développements fructueux. Et la tendresse soulage le stress quotidien simplement en étant entouré de personnes, de choses ou d’animaux qui nous inspirent ce sentiment. L’attention affectueuse peut être l’élément le plus signifiant du leadership régénératif si on la définit comme étant la tendresse avec laquelle l’attention peut se déployer envers soi, les autres et la nature. Le remède contre les problèmes de santé mentale qui touchent les collaborateurs dans les entreprises ou de santé environnementale qui se traduisent en bon nombre d'épidémies qui se développent souvent en ne portant pas assistance aux populations déplacées Source
Définir la tendresse avec des mots n’est pas facile, mais si l’on consulte le dictionnaire cela vient d’abord nous dire que c’est un sentiment d’affection attachante que l’on manifeste devant des personnes, des animaux, des choses ou des situations à cause de leur douceur, naïveté, faiblesse, gentillesse, naïveté, délicatesse, innocence, affection, affection ou amour. La tendresse est un acte qui se traduit par de l’affection et de l’empathie au sein de nos relations sociales car il se réalise directement par la proximité et fait ressortir notre part la plus douce et la plus sensible en nous. La tendresse donne de la qualité à nos liens, bien qu’actuellement dans ce domaine, il s’agit d’un aspect quelque peu négligé. Mais il nous est parfois difficile d’exprimer ce sentiment car cela peut exposer notre propre vulnérabilité. Source
Olivia Farkas s’interroge sur la tendresse en psychanalyse dans « L’École de Budapest, un courant tendre de psychanalyse ». Où et comment repérer la tendresse dans le contexte violent du début du xxe siècle ? Le champ d'exploration de la tendresse en psychanalyse est essentiellement celui de la mère pour son enfant ou des enfants qui développent une relation affective avec leur environnement, en particulier leur mère. Pourtant, elle nous indique que le mot "tendresse" revient souvent dans les écrits de Sándor Ferenczi en précisant que « Ferenczi n’a pas de patients enfants, mais possède la capacité de percevoir l’enfant chez ses patients adultes". En psychanalyse la tendresse du thérapeute pour ses patients est tabou, au mieux en Gestalt-thérapie le thérapeute est en empathie tel un miroir des émotions de son patient. Sándor Ferenczi est un neurologue et un psychanalyste hongrois. Tendresse en hongrois se dit gyengédség, un terme largement employé dans la vie courante qui peut définir un sentiment, un comportement, une attitude vis-à-vis d’autrui comme de soi-même. La tendresse est l’expression de l’empathie, de l’amour et « joue un rôle important dans les relations humaines et dans le maintien de notre santé mentale". La tendresse en psychanalyse, la levée des tabous Éditorial Par Elena Adam
Laurent Tigrane Tovmassian dans « La tendresse comme vecteur de transformations et de symbolisation, de la survie au rêve » développe son émergence dans sa pensée et les répercussions nécessaires sur sa clinique : « Le toucher même psychique est un acte, la tendresse est aussi l’acte qui permet de transformer la détresse. La tendresse en séance n’est pas dans le rapprochement et le contact physique, mais dans le contact peau psychique à peau psychique » Il ne voit la tendresse ni comme pulsion d’auto-conservation ni comme pulsion sexuelle inhibée quant au but – les deux définitions proposées par Freud – mais comme un pont entre ces deux registres transformant le brut vers le rêve. La tendresse, de la survie au rêve Transformations, symbolisation Le Coq-héron
L'amour peut il passer de la sphère personnelle à la sphère professionnelle ? Il semble de prime abord que les recherches sur l'empathie ont laissé l'amour et son expression tendre aux portes de l'entreprise. Il est souvent postulé que le terme "amour" recouvre trois sentiments distincts depuis la Grèce antique : l'éros, la philia, et l'agapè. L’agapè est l'amour du prochain, une relation univoque que l'on rapprocherait aujourd'hui de l'altruisme. Il se caractérise par sa spontanéité, car ce n'est pas un acte réfléchi ou une forme de politesse, mais une réelle empathie pour les autres. L'empathie correspond à la capacité de se mettre à la place d’autrui pour comprendre ce qu’il ressent. Et que avoir de l’empathie favorise la reconnaissance des sentiments et des émotions d’une autre personne : qu’elle ressente de la joie, de la tristesse ou une quelconque souffrance. Il en existerait uniquement 3 types : L’empathie émotionnelle ou affective : la personne empathique ressent l’émotion et l’état affectif d’autrui. L’empathie cognitive : il s’agit de la capacité à comprendre les pensées et les intentions des autres. L’empathie mature : cette forme combine les deux types précédents. Au mieux on parle de contagion émotionnelle ou résonance affective. Mais pas de tendresse.
On trouve toutes fois les germes de la tendresse chez les porteurs du CARE dans l'entreprise et plus largement les organisations. Ce concept est apparu aux États-Unis dans les années 1950 avec les travaux de Lawrence Kohlberg et de Carol Gilligan qui mettent en avant la responsabilité, l’échange et l’attention à autrui. Carol Gilligan parle d'"éthique de la sollicitude". La sollicitude est employée selon une acception particulière, qui regroupe : attention aux autres, soin, responsabilité, prévenance, entraide, prise en compte des besoins, des relations et des situations particulières, travail et accent sur la vulnérabilité et la dépendance des personnes concrètes. On reste un peu loin du manifeste du CARE qui a été rédigé par un collectif attaché à la notion d'interdépendance qui s’inscrit dans la pensée de J. Tronto (2009) qui distingue le fait de prendre physiquement soin d’autrui (caring for), de prendre soin et de porter attention aux autres sur le plan émotionnel et affectif (caring about) et, enfin, de prendre soin de leurs problèmes dans l’action politique et sociale (caring with). Une société où chacun prendrait davantage soin de l’autre, c’est la société du "care" que défend la philosophe et psychanalyste Cynthia Fleury en France.
La bascule vers la tendresse en entreprise peut se faire en analysant le vécu des professionnels du care. Le personnel soignant dans les établissements de soin. Pascale Molinier s’élève contre l’irruption des "éthiciens" et autres spécialistes de la "bientraitance" qui prétendent enseigner aux soignantes comment maintenir la "bonne distance professionnelle" vis-à-vis des patients. L’amour gâcherait le professionnalisme, il lui serait en tout point antinomique. C’est la fameuse « bonne distance » où il convient certes d’être « empathique » ou bienveillant, mais de façon professionnelle. Mais de leur côté, les salariées qui travaillent en première ligne avec les personnes dépendantes peuvent vivre ça autrement : « Où trouverait-on l’énergie de s’occuper des personnes s’il n’y avait pas cet amour-là" ? Le malentendu est total puisqu’au nom du professionnalisme, il s’agit de réprimer et combattre les valeurs domestiques et ce qu’elles soutiennent de création d’humanité pour leur en substituer d’autres, soi-disant plus susceptibles d’assurer le respect, la dignité et la reconnaissance de l’altérité, mais qui sont étrangères, et la plupart du temps le demeurent, à l’univers de significations des soignantes. Source
Ce n’est que récemment que les émotions ont pu obtenir reconnaissance dans le milieu professionnel, pourtant pas d’empathie sans création de proximité. Ou, pour le dire dans les termes d’Avishai Margalit, sans création de « relations épaisses », « c’est-à-dire de relations que nous avons avec ceux avec qui nous partageons une histoire significative ». Nous nous soucions de nos proches mais nous ne nous soucions habituellement pas « des autres au sens large, ni de leur bien-être » ; il en résulte que le meilleur modèle dont nous disposons quand il s’agit de prendre soin concrètement d’autres qui nous sont initialement éloignés, c’est le modèle des relations épaisses. Il ne s'agit pas tant de retrouver sa nature animale avec par exemple une forme instinctive de relations aux autres. Il s'agit plutôt de vivre dans un monde où les relations sont naturelles, c’est-à-dire perçues et vécues comme telles. Ce que nous désignons, du point de vue du sens commun, comme «naturel » n’a rien à voir avec une Nature biologique ou non domestiquée des êtres et de leurs relations.
Comment développer sa tendresse ? Si la biophilie peut se développer au contact de la nature, alors l'amour de son prochain se développe probablement au contact des autres. En commençant par soi, en s'accordant cette tendresse. Eco émotions et biophilie. Mais personne ne peut prendre la charge de prendre seul soin de tout le monde, du monde, c'est pourquoi la note sur le leadership régénératif se conclue sur la culture de la régénération que le leader régénératif doit développer dans son entreprise et au delà dans la société.
Quand la culture de la régénération se développe alors chacun sait comment prendre soin de soi, des autres et de la nature.
DÉCOUVRIR NOS ATELIERS RÉGÉNÉRATIFS
-La Fresque du Facteur Humain - pour favoriser de nouveaux comportements en explorant 10 facteurs de changement de comportement, des biais cognitifs aux motivations au sein de son entreprise, sa collectivité locale ou d’une équipe projet
-La Fresque des Émotions - pour cultiver l'intelligence émotionnelle, mettre des équipes en mouvement à partir d'émotions les motivant à agir collectivement.
-La Fresque des Imaginaires - pour se projeter son territoire, son entreprise, sa marque et ses produits dans un futur responsable et désirable , en connexion à la nature
- Le Business Model Canvas de l'Entreprise Régénérative - pour concevoir des produits, services et projets à impact qui transformeront les organisations dans leur écosystème en rendant des services socio écosytémiques tels que : sols, biodiversité, qualité de vie, juste rémunération….en lien avec les objectifs CSRD
Les ateliers de Nous sommes vivants
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.