Aujourd’hui les tendances sont partout. Mode, musique, art, déco, cuisine : tout semble devoir être passé au tamis un peu totalitaire de ce nouveau dogme.
Du textile à la pub...
Issues à l’origine des bureaux de style travaillant pour les acteurs du monde du textile, l’étude et l’analyse des tendances consistent à renifler l’esprit du temps, repérer des micro-faits, rassembler et hiérarchiser des informations de toutes sortes. Le résultat de ces études, souvent rassemblé dans des "Cahiers de Tendances", se veut prospectif : la couleur dominante de la saison prochaine en prêt-à-porter sera le gris, la matière dominante la fourrure...
Les agences de communication ont rapidement été séduites par ce type de recherche. Dévoreuses d’études et soucieuses de l’état de l’opinion, elles ont intégré l’étude des tendances comme une analyse de contexte, non comme une vision prospective. Là où les chercheurs de tendances couraient le monde afin de prévoir ou de provoquer une mode, les publicitaires ont cherché à mieux cerner de nouvelles attitudes, de nouveaux comportements, de nouveaux usages, afin de produire des communications plus efficaces, en ligne avec les attentes de plus en plus complexes des consommateurs.
L’âge d’or des tendances
Les planners stratégiques, dont une des fonctions principales est de connecter les attentes des consommateurs avec les messages publicitaires, sont devenus légitimement les utilisateurs principaux de ce type d’études dans les agences. Ceux-ci ont dès lors placé des Cahiers de Tendances au centre de leur réflexion stratégique. Conçus comme une photographie (la plupart du temps annuelle) des mouvements de la société et de phénomènes macro-sociétaux, ces documents ont ainsi permis de repérer la montée de tendances comme la radicalisation des crispations autour de l’automobile, ou l’apparition du sentiment de vulnérabilité lié à l’alimentaire et ses nouveaux dangers, influençant ainsi les tonalités des créations ou les thèmes d’opérations de sponsoring. Des agences média (comme Carat) ou des instituts (comme le CCA) ont créé et développé des offres basées sur l’études des tendances.
Un outil plus qu’un Graal, au service d’un métier en pleine évolution
Mais tout comme la vogue de la sémiologie, l’étude des tendances semble avoir fait son temps. Elle se confronte de plus en plus directement au problème de l’opérationnalité, semblant suivre une évolution parallèle à celle du métier de planner stratégique. Autrefois cantonné au rôle de "tendanceur", de "passeur" d’idées, le profil de celui-ci se tourne de plus en plus vers une fonction réellement stratégique et opérationnelle. Le planner stratégique, tel qu’on le connaissait, semble condamné, la facette "études et analyse des tendances" cédant le pas progressivement à un nouveau rôle, en contact plus direct avec le client : celui d’«architecte» de stratégies de communication.
Dans cette nouvelle configuration, le planner stratégique construit les plateformes de communication des marques, conceptualise les idées au centre de celles-ci, définit les moyens de communication, et briefe les créatifs ou les commerciaux.
Les tendances restent ainsi primordiales pour comprendre le contexte dans lequel s’inscriront les communications des annonceurs et pour définir les idées au centre des plateformes, mais elles n’occupent déjà plus la place qui était la leur il y a encore quelques années, redevenant un outil, au service de la réflexion stratégique.
Thomas Jamet
Planneur Stratégique