Pourquoi je ne publie pas ici un compte-rendu de la conférence Le Web3 ?
D'abord
parce-que peut-être que vous vous en foutez, mais aussi et surtout
parce-que d'autres l'ont déjà fait, mieux et plus complètement que je
ne l'aurais fait moi-même.
Pour ma part j'ai préféré commenter à
ma façon (!) d'autres aspects de l'évènement, et vous proposer ici une
petite compilation de liens intéressants au cas où :
Bon maintenant mon point de vue sur la Grande Messe.D'abord
je préfère vous prévenir tout de suite : je ne pourrai pas être
objectif car j'étais invité, et quand je suis invité je n'ai pas pour
habitude de cracher dans la soupe et de débiner mes hôtes dès qu'ils
ont le dos tourné (d'autres font ça très bien - tout en prétendant dans
un grand élan de franchise quelque billets plus tard être "sincèrement
désolés - cherchez un peu, vous allez trouver).
D'autant que je n'ai
aucune raison de le faire car personnellement j'ai apprécié cet
évènement à sa juste valeur, avec en prime un regard de newbie vu que
c'était une première pour moi.
Sur la forme : l'organisation
était impeccable, la bouffe excellente (si si c'est important, et ce ne
sont pas les convives américains qui me contrediront), tout roulait
comme une mécanique bien huilée.
Sur le fond :
je n'étais clairement pas venu là pour chercher du scoop, car je ne
pense pas que ce soit l'objet de ce type de conférence (même s'il y
avait de la matière du côté du Start-up lounge, ou plusieurs dizaines
de jeunes pousses venaient exposer leur projet dans un temps imparti de
10 minutes). En revanche
il était intéressant de voir se confronter des points de vue, des visions, des experts bien plus intelligents que moi se livrer à de la prospective...
A ce titre j'ai particulièrement apprécié l'histoire et les motivations de
l'aventure Netvibes
décrites de façon très claire par l'un de ses fondateurs Tarik Krim, et
la vision de l'émergence des nouveaux media qui lui faisait écho avec
Pierre Chappaz.
Plus iconoclaste mais brillantissime, l'intervention passionnante de
Hans Rosling, professeur de Sante mondiale dans une université renommée de Suède, et accessoirement créateur du service de statistiques
Gapminder,
sur un sujet pourtant aussi aride que l'évolution socio-démographique
dans les pays émergents, intitulée "The real World and why it matters /
le monde réel et pourquoi cela compte". C'est la première fois que je
vois une assistance se lever pour applaudir
pendant
une intervention comme on le ferait avec une rock-star ou un tennisman
qui viendrait de placer un ace imparable, sans parler la longue
standing ovation qui a ponctué la fin de son discours.
Je comprends maintenant pourquoi le Prix Nobel est un truc qui fut inventé en Suède.
Je
crois que ce type de conférence vaut autant pour la capacité à faire se
rencontrer des gens en off que pour les panels d'intervenants.
D'ailleurs il est intéressant de noter que les pauses étaient nommées
Networking, cela ne pourrait pas être plus clair.
Concernant maintenant les interventions des hommes politiques
: c'est sur ce sujet que la polémique bat son plein, polémique dans
laquelle il me semble quand même déceler un léger parfum de poujadisme
très français. Je crois qu'il faut un peu se calmer et remettre les
choses en perspective. Nous sommes dans une société pleine de
paradoxes, où l'on reproche à peu près tout et son contraire aux
politiques.
Ainsi on leur reprochera facilement - et parce-que
le sujet est à la mode - de n'être pas assez proches des préoccupations
des citoyens, ce qui en terme geek pourrait se traduire par "pas assez
au fait des nouvelles technologies".
Mais nous leur
reprocherons aussi promptement l'inverse : qu'ils prennent le risque
(non négligeable en termes d'image) d'improviser une intervention sur
le sujet au cours d'une grande conférence sur le web devant un parterre
d'experts exigeants, et on critiquera assi vertement leur attitude, que
l'on jugera opportuniste, démagogique, ou pire, populiste.
Faudrait
savoir. Bien sûr nous ne sommes pas dupes, bien sûr on sait bien que
Bayrou et Sarkozy sont venus ici attirés par le buzz médiatique à la
recherche d'une audience potentielle et d'une image pour leur campagne
électorale. Et alors ? Ne nous voilons pas la face : nous ne sommes pas
des oies blanches, tout le monde sait que la réussite politique passe
aussi par un opportunisme, voire un cynisme de tous les instants, la
belle affaire.
Et je suis de ceux qui pensent que les deux candidats
en question (car c'est de cela qu'il s'agit, n'est-ce pas ?) n'ont pas
dit que des conneries, et que même si le discours de Sarkozy était
formaté, rédigé à la hâte et lu maladroitement, il contenait quelques
points d'intérêt comme ce projet de faire des universités des zones
franches pour favoriser l'éclosion de start-ups.
Et j'ai aussi
été agréablement surpris de constater qu'un homme comme françois Bayrou
n'a pas eu peur de mouiller sa chemise, et de prendre le contrepied de
l'évidence (cela aurait été si confortable pourtant) en affirmant
clairement par exemple que l'éducation ne pouvait pas se satisfaire
d'une diffusion unique par internet, concluant sa démonstration par une
sentence pleine de lyrisme que je vous livre comme je l'ai reçue :
"l'éducation ce n'est pas seulement transmettre du savoir, c'est aussi
transmettre de l'humanité".
Et puis remettons les choses dans leur
contexte : même si je peux comprendre que des américains ou des
australiens n'aient pas grand chose à faire de nos petites affaires
politiques (c'est qui Sarkozy ?), cette parenthèse aura duré en tout et
pour tout une heure sur deux jours bien remplis, sans que quiconque ait
eu à renoncer à sa présentation (ce sont
les pauses café et déjeuner qui ont été raccourcies).
Loïc
Le Meur a peut-être été un peu maladroit sur ce coup, mais on ne peut
pas lui reprocher une volonté à mon avis sincère de se battre pour
essayer de faire entrer le web dans la politique, ou la politique dans
le web, car c'est bien un sujet qui mérite qu'on s'y intéresse un peu,
non ?
Quant à Shimon Peres, que
voulez-vous que je vous dise : le vrai discours politique, au sens le
plus noble du terme, c'est lui qui l'a tenu. Ce type de 85 ans,
au cuir tanné par des décennies de lutte, ce géant de la diplomatie,
est venu là sans n'avoir rien à vendre, pour nous infliger une
véritable leçon de réalisme, et nous proposer une vision presque
prophétique de l'évolution du monde, loin des conflits qui grangrennent
sa région.
Plus étonnant encore : le gars montre une connaissance
presque organique du Web, de l'entreprenariat et des enjeux liés aux
nouvelles technologies qui le placent définitivement un ton au-dessus
des politiciens français (ou européens).
Une leçon, vraiment.
Quant
à la non-venue de Ségolène Royal, elle est effectivement regrettable et
je ne sais comment l'interpréter, tant on pourrait imaginer deux
possibilités opposées : soit elle a considéré qu'il était inconvenant
de venir se fourrer dans ce guêpier, qu'une intervention au débotté sur
un sujet qu'on maîtrise mal pourrait très vite être mal interprêté, et
que sa crédibilité avait beaucoup à y perdre, la polémique actuelle lui
donnant plutôt raison, et dans ce cas reconnaissons-lui un flair
certain. Soit à l'inverse elle n'y entend rien à l'internet et à ses
enjeux, et elle a tout simplement jugé tout à fait inutile de perdre
son temps avec cette manifestation qu'elle estime tout à fait
anecdotique.
Mais tout cela n'est que mon point de vue bien sûr.
Allez, vivement le Web4 (au stade de France ?) ;-)
PS : Pour le speech de Shimon Peres,
vous avez plusieurs vidéos sur Vpod.tv et Dailymotion. Je ne sais pas
si on peut avoir quelque part la vidéo intégrale en une pièce.Sur dailymotion : http://www.dailymotion.com/visited/search/shimon+peres/1Sur Vpod.tv, allez ici : http://www.vpod.tv et sélectionnez le tag leweb3