La cible ne se résume pas à un individu. Et l’individu est moins acteur qu’agi. L’objet de ce qui doit être ciblé doit être élargi à l’espace et au collectif.
La transformation muette. Feu l’individu.
Oublions nos petites habitudes juste le temps d’un jeudi. On pense encore beaucoup la cible sous la forme d’un individu. Et l’individu comme le sujet social et l’acteur des phénomènes de consommation/communication.
Pourtant, si depuis trois siècles, on a accepté de modifier notre compréhension du monde, il se trouve que nous avons une crispation sur le thème de l’individu comme acteur social, et unité minimale de nos organisations et de la consommation.
Si aujourd’hui notre marketing éprouve une difficulté à définir le contour du sujet social, du sujet de l’action ou de la conversation, c’est qu’en creux, une transformation sociale a eu lieu, muette, secrète, et qui pourtant impacte très fortement le quotidien et la réalité économique. Une approche avant tout sociologique permet d’entériner la rupture, et faire le constat que l’objet de ce qui doit être ciblé doit être élargi à l’espace et au collectif.
Cibler c’est territorialiser.
Quatre idées simples pour le comprendre :
1 Constater la difficulté à réduire les phénomènes de consommation à l’action isolée d’un consommateur sur un marché, notamment dans un cadre dit postmoderne, ou dit de capitalisme cognitif.
2 Elargir l’événement consommation à une relation avec d’autres personnes et avec un lieu. La consommation est un phénomène qui ne se réduit pas à la consommation.
3 Prendre en compte l’imaginaire structurant qui existe avant l’effectuation de l’acte consommatoire, soit dans l’esprit des participants, soit dans le lieu. Comprendre le réel par l’irréel. (Weber)
4 Comprendre en quoi l’acte de consommation / de communication entre en résonance, en anamnèse, avec d’autres événements structurants pour le groupe de référence auquel le consommateur se réfère.
Ce qui fait dire au Pr. Michel Maffesoli, « on est plus agi que l’on agit. »
Donc, consommer, c’est avant tout participer d’un phénomène dont chacun n’est que la partie émergeante. Consommer, c’est rappeler (au sens du ressouvenir mythologique de S. Moscovici). Consommer c’est célébrer.
Suite au prochain apéro ? Jérémy, tu me passes les olives ?
Stéphane Hugon, sociologue.
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