Designer numérique et essayiste Adam Greenfield est l’un des architectes d’information les plus influents et reconnus aux Etats-Unis. Il a dirigé le département du design numérique du fameux cabinet Razorfish à Tokyo.Adam Greenfield : “Everyware”, pour un design humaniste des technologies ambiantes
Pourquoi c'est intéressant pour le programme d'actions "Identités actives" ? >>> Parce que l'Ubimedia décrit par Adam Greenfield illustre à merveille les problématiques des identités "actives" : l'individu est au cœur des technologies et des réseaux ; si ces dernières peuvent par bien des aspects lui faciliter le quotidien, elles peuvent aussi provoquer des effets externes pas toujours désirés. L'enjeu de l'Ubimedia devient ainsi la capacité de contrôle que garde l'individu sur les objets et réseaux qui l'entourent et la liberté de choix d'arbitrer entre ce qu'il gagne en terme de commodité et ce qu'il perd en terme de dévoilement de soi, ses données, son intimité" --------------------------------------------------------------------------------------------------- InternetActu.net : Votre ouvrage a pour titre Everyware. Que recouvre ce néologisme ? Adam Greenfield : “Everyware” est une expression qui rassemble une classe de technologies émergentes que l’on décrit de manières variées : “informatique omniprésente” (ubiquitous), “réseaux pervasifs”, “médias tangibles”, “intelligence ambiante”, … Toutes ont en commun le fait d’affranchir les systèmes, appareils et services fondés sur le traitement de l’information du paradigme de l’ordinateur, pour les “libérer” dans le paysage et l’expérience bien plus vastes de notre vie quotidienne. Même s’il peut y avoir des différences significatives entre ces différentes expressions, il me semble qu’elles produisent des effets qui seront ressentis de manière similaire, voire identique, par les être humains qui les utiliseront - et dans la mesure où je me concentre avant tout sur l’amélioration de l’expérience de l’utilisateur, j’ai défini un cadre qui reflète cette priorité. En outre, par définition, ces technologies de traitement de l’information devenues omniprésentes s’adressent à un public beaucoup plus vaste, sans expertise particulière. Et je pense qu’il est essentiel de proposer à ceux qui croiseront ces systèmes dans leur vie quotidienne une explication aussi peu technique que possible. Si dans le même temps, l’expression “everyware” parvient à conserver une certaine rigueur en tant que définition, c’est encore mieux. InternetActu.net : En quoi l’”everyware” diffère-t-il de la manière dont nous utilisons et vivons aujourd’hui les technologies numériques ? Adam Greenfield : Les différences sont peu nombreuses mais importantes. Trois d’entre elles sont immédiatement visibles : d’abord, au lieu du lien binaire entre un service et un appareil, caractéristique de l’ère du PC, l’utilisateur de l’everyware interagit simultanément avec un grand nombre d’appareils et de services. En second lieu, ces appareils et ces services sont enfouis dans les objets et les surfaces de la vie quotidienne, d’une manière plus ou moins perceptible. Enfin, l’interaction avec ces services fait en général appel à la voix, au geste, au toucher, et plus du tout aux menus, pointeurs et autres accessoires qui caractérisent les interfaces graphiques des ordinateurs. Mais la différence la plus importante est sans doute qu’à la différence de l’ordinateur individuel, dont l’usage résulte toujours d’un acte volontaire, on peut interagir avec l’everyware sans en avoir pris la décision consciente, sans y penser, sans le savoir ou même, sans le vouloir. InternetActu.net : Pour vous, l’everyware ne change pas seulement notre relation à la technologie, il “restructure le monde et notre expérience du monde“. De quelle manière ? Avez-vous quelques exemples ? Adam Greenfield : Je vois émerger un phénomène d’”autorisations différenciées”, au travers duquel certaines personnes, du fait de certains attributs de leur statut social enregistrés quelque part dans une base de données, gagneront un accès préférentiel à certains lieux et services. Bien sûr, le phénomène n’a rien de neuf en lui-même, mais il a généralement un caractère implicite dans nos relations sociales. Les technologies numériques requièrent, elles, que les choses soient encodées de manière explicite - ce qui réifie ces niveaux d’accès et les transforment en attributs indélébiles de votre personnalité, gravés dans le marbre numérique. Je crois que beaucoup de gens ressentiront un choc - social, psychologique, émotionnel - quand ils réaliseront que le monde ne reconnaît pas de manière universelle leur côté “spécial”, leur sentiment de leur propre importance. Pour prendre un autre exemple évident, je crois que l’everyware va s’immiscer dans les processus de socialisation, ceux par lesquels nous choisissons avec qui nous souhaitons entretenir des relations ou non. Nos opinions sur les autres vont acquérir le statut de toutes les valeurs numériques - elles vont devenir des faits -, elles vivront éternellement en dehors de nous, dans les réseaux que nous bâtissons pour les contenir, prêtes à ressortir lors de toute nouvelle interaction sociale. A nouveau, le fait d’expliciter et de rendre publiques des évaluations qui restaient jusqu’ici latentes et personnelles, aura des conséquences profondes, et pas nécessairement positives. Pour lire la suite
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SOURCE : identitesactives.net
PAR: alexis mouthon
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