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Un Festival de plus en plus politique
Les intervenants des Keynote Speeches ces dernières années nous avaient mis la puce à l'oreille : Al Gore en 2007, Kofi Annan en 2009, et Bill Clinton en 2012... La dimension politique de Cannes n'est pas à mettre en doute. Et la main mise américaine en terme de représentativité, n’est plus non plus à questionner. Et, couplé à ces intervenants de haute volée, un chiffre : cette année, 25% des festivaliers étaient des annonceurs, contre 20% l'an passé. D'ailleurs, côté français, on se demande si le nombre d'annonceurs n'a pas dépassé celui des créatifs ! Soyons lucides, de plus en plus de business se passe à Cannes. Une bonne nouvelle, certes, mais qui ne doit pas s’opérer aux dépens de la création, comme ce fut le cas de la Advertising Week de New York, qui ressemble de plus en plus à une place de marché plutôt qu’un endroit où l’on célèbre la créativité… Ce n’est pas encore le cas du Festival de la créativité de Cannes. Envoyer des travaux de qualité et être présent lors du Festival restent de bons moyens de voir la créativité française représentée.
Les messages envoyés par l'industrie
Jamais autant que cette année on n'aura entendu les jurés parler d'engagement sociétal, de responsabilité sociale, de conscience morale... Et de fait, la quasi totalité des Grands Prix attribués intègrent cette dimension, depuis l'évident Chipotle avec sa campagne cultivate (GP Film et GP Branded Content), jusqu'au Solar Annual Report d'Austria Solar prônant l'usage de cette énergie responsable (GP Design), en passant par Benetton et son Unhate (GP Press), Coca-Cola et #cokehands (GP Outdoor), sans oublier Amercian Express et le Small business day (GP Direct et GP Promo), ni Banco Popular de Puerto Rico dont la campagne The most popular song incitait les Portoricains à aller travailler (GP PR). De fait, le discours du président du jury Press & Film ne laissait pas de place au doute : "Cette récompense est un message que nous envoyons pour promouvoir la culture de la tolérance. C'est une campagne qui dégage une émotion forte et qui a un réel impact. C'est aussi un point de vue sur la vie, sur les sujets qui nous affectent tous. Qu'on l'aime ou qu'on la déteste, elle ne laisse pas indifférent, elle fait réagir, avec un sens de la provocation génial mais pas choquant. En tant qu'industrie, on a une responsabilité sociale. Ce Grand Prix est également un message culturel, un message envoyé aux marques. On ne fait pas que vendre des produits; on touche le consommateur et en ce sens, on a une responsabilité par rapport à eux". Question en corollaire de ces choix : depuis combien de temps une campagne pour une marque d’alcool n’a-t-elle pas remporté de Grand Prix ?
USA First
Au-delà de l’image que veut renvoyer le festival, enjeu politique là encore, parlons un peu des juries, justement. Particulièrement flagrant en Branded Content & Entertainment, se pose la question de la prédominance des jurés anglo-saxons : 16 membres au total dans cette nouvelle catégorie, dont un président de jury américain, 4 jurés made in USA, 2 made in UK, auxquels on peut ajouter un juré ‘global’, lui-aussi anglo-saxon… Soit la moitié du jury ! Un état de fait qui ne remet pas en cause le travail des agences américaine ni celui de leurs (gros) clients à gros budgets, ni même l’avance du pays en terme de technologies, de maturité dans la travail etc., qui lui valent cette année de repartir avec quelque 181 statuettes et 7 Grands Prix (sur 15 catégories). Néanmoins, les anglo-saxons étant bien plus imprégnés de culture lobbyiste, gageons que cette sur-représentativité au sein des juries finira par poser problème, a l’instar du micro-scandale cette année de la catégorie Media.