Tu me likes, et après?
Marketing Magazine Anne Magnien
Comment être utile et créatif sur les réseaux sociaux? C'est la question centrale du troisième colloque Futur Pub, qui s'est tenu à Bordeaux. Des réponses émergent sous le double prisme de la création et du lien social.
Imaginez un restaurant que vous seriez obligé d'aimer et de recommander à vos amis avant de pouvoir en goûter la cuisine et en tester l'ambiance. Absurde. C'est pourtant ce que les marques ont jusqu'à présent demandé aux consommateurs sur Facebook. Cette époque est révolue. En fluidifiant l'expérience utilisateur, la nouvelle timeline de Facebook contraint les marques à repenser la nature de leurs interactions. Il ne s'agit pas seulement de payer plus pour accroître sa visibilité ou de développer ses propres applications, ce qui sera l'apanage des gros budgets. L'enjeu est aussi d'installer une vitrine plus engageante et d'instaurer des relations plus transparentes.
Sur le nouveau Facebook, on peut faire du storytelling, apporter du contenu informatif, culturel, ludique, créer de l'animation, faire circuler des coupons de réduction, le tout de façon simple. Mais le plus marquant, c'est que l'actualité de la marque se construit désormais avec tous les commentaires des passants, positifs et négatifs, comme un spectacle interactif. Sur La Redoute, une cliente désespérée par une erreur de livraison kafkaïenne est soutenue par sa copine, qui harcèle la community manager pendant des heures, tandis qu'à côté, les gagnants du dernier jeu-concours envoient la photo de leurs cadeaux pour remercier. Désormais, c'est le one-to-one qui fait le show. Qu'elle ait été ou non l'objectif premier, la relation client devient prépondérante. Pour les distributeurs d'abord, pour toutes les autres marques ensuite. Chez Voyages-sncf.com, tous les «irritants», en provenance des comptes Facebook, Twitter ou d'ailleurs, sont regroupés et traités par une «loveteam», où se retrouvent chaque semaine la direction générale, la direction technique, les services de relation client et le community management. On en comprend bien l'intérêt.
La cocréation comme lien social
Reste que, pour qu'un passant ait envie d'interagir avec une marque, voire de lui donner accès à ses données personnelles, il faut lui offrir ce qu'il est venu chercher sur les réseaux, à savoir la socialisation, le divertissement, l'information et la réalisation de soi. Au vu de tous les exemples français et internationaux que nous avons observés à l'occasion du colloque Futur Pub ce printemps, plusieurs tendances se dégagent. La majorité des marques proposent du divertissement, des advergames à partager avec les copains. Ce qui conduit à une surenchère permanente pour maintenir l'attractivité. Autre mécanique fréquemment utilisée, la méthode Oreo, qui consiste à célébrer le fan de la semaine en publiant sa photo. L'échange est clair: je fais la pub de la marque, qui me donne mon quart d'heure de célébrité. Les concours qui valorisent non plus l'apparence mais la créativité du fan s'avèrent un peu plus engageants. Cependant, ce genre de mécanique ne suffit pas à constituer une communauté. Pour cela, il faut faire de la cocréation, comme Starbucks, qui demande des suggestions pour améliorer ses produits, ou bien offrir de la socialisation utile. Sur le forum de la plateforme Troc Conseils de Castorama, les internautes échangent des conseils de bricolage (600 000 visiteurs uniques par mois). Sur sa plateforme Troc Heures, ils échangent leurs compétences.
En matière d'utilité, les pistes les plus intéressantes sont celles du social shopping. L'idée est de faciliter l'achat du produit grâce à un groupe («Petits voyages entre amis», de Voyages-sncf.com) ou de permettre au consommateur de demander l'avis d'un ami au moment de conclure un achat. Sur La Redoute, pendant qu'il visite les pages produits, le consommateur peut tchatter en direct. Un vieux truc de commerçant, boosté par des technologies encore expérimentales. En attendant, la finalité est qu'il y ait commerce... au moins dans la vraie vie.
Au-delà du coût d'acquisition du fan, se pose le problème de sa transformation en client, avec une variable difficilement mesurable: le capital sympathie. Sur «Vies de chats» de Whiskas, les internautes se racontent des histoires de chats et se montrent leurs photos. Ici, l'intérêt n'est pas tant la célébrité du chat que les relations amicales qui se tissent entre les maîtres. Créer du lien social, ce n'est pas forcément cher et ça peut rapporter gros.
Anne Magnien (Futur Pub):
« L'actualité de la marque se construit désormais avec tous les commentaires des passants, comme un spectacle interactif. »