http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07-Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf
1- PRESENTATION DE L'ECONOMIE COLLABORATIVE
L'économie collaborative est un secteur aux contours mal définis qui regroupe des acteurs différents :
- l'économie du partage : les transactions entre particuliers s’effectuant sans aucune contrepartie (ex. : don), des transactions s’effectuant avec une contrepartie réelle (ex. : troc).
- l'économie des plateformes : des acteurs économiques jouent le rôle d’intermédiaire entre les particuliers, mais il y a aussi des professionnels. Les transactions s’effectuent avec une contrepartie monétaire (ex. : location).
- la solidarité : des entreprises issues du monde associatif et de l'économie sociale et solidaire.
Le consommateur passe du statut unique de « demandeur » à un double statut d’ « offreur-demandeur ».
5,2 % de la population française tire plus de 50 % de son revenu de la consommation collaborative. Les particuliers tirant plus de 50 % de leurs revenus de l’économie collaborative sont aussi ceux qui dépensent majoritairement plus de 50 % de leurs dépenses courantes dans le cadre de l’économie collaborative..
De nouveaux acteurs, des starts ups issus d'internet
Les NTIC, le e-commerce et les réseaux sociaux ont contribué au développement de plateformes internet accessibles au plus grand nombre, permettant de mettre en relation des particuliers ne se connaissant pas au préalable pour réaliser des transactions et démultipliant les possibilités d’interaction et de coopération. Certaines starts ups ne sont plus des starts ups vu la taille des entreprises et leurs levées de fond spectaculaires pour assurer leur développement, notamment à l'international.
La France fait partie du trio de tête des pays où la consommation collaborative s’est le plus développé, avec notamment les États-Unis.
- Dans le secteur de la mobilité, BlaBlaCar fait partie des plateformes leaders du covoiturage en Europe
- Dans le secteur de l’alimentation, VizEat ou la Ruche qui dit Oui (LRQDO) sont des plateformes de référence et proposent dans de nombreux pays des solutions collaboratives (repas collaboratifs, groupements d’achats de produits frais entre particuliers, etc.).
- La France est également l’un des pays européens où le financement participatif est le plus dynamique, avec une croissance de plus de 100 % entre le premier semestre 2013 et le premier semestre 2014. Ulule, plateforme de don, est ainsi la première plateforme européenne en termes de projets financés et de montants collectés.
- Enfin, l’hexagone accueille de nombreuses entreprises sur des secteurs en plein essor telles que Costockage, leader du self-stockage entre particuliers.
L'économie collaborative concerne toutes les parties de notre quotidien (par ordre décroissant d'usage par les français.) :
- s'équiper
- de faire aider
- se nourrir
- se déplacer
- s'habiller
- se loger
- se divertir
- transporter
- se financer
Trois secteurs d’activité rassemblent plus de la moitié des acteurs de la consommation collaborative.: se financer (62 acteurs), se loger (40 acteurs) et se déplacer (35 acteurs).
Les secteurs « s’équiper » (transactions de bien) et « se faire aider » (échanges de services), concentrent la majorité des pratiques collaboratives des Français, ont été réalisées par plus d’un Français sur deux.
2- SOMMES NOUS EN TRAIN DE CHANGER LE MONDE ?
Les valeurs proclamées et revendiquées par les pionniers (redonner un sens à l’acte de consommation via une densification des interactions humaines, préserver l’écosystème en partageant et en allongeant le cycle de vie des biens de consommation, etc.) ne sont en effet pas forcément celles qui dominent l'économie collaborative d'aujourd'hui.
Trois grands profils d’entrepreneurs alternatifs
- Les idéologues : les solutions proposées par ces entrepreneurs sont présentées comme des contributions à la construction d’un modèle de société alternatif. Deux typologies d’idéologues coexistent :
o Les socio-environnementaux : les tenants d’une logique de partage, de solidarité et de protection de l’environnement (GuestToGuest),
o Les libéraux : ceux qui mettent en avant les perspectives d’auto-entrepreneuriat et de création de valeur dans un contexte plutôt dérégulé (Koolicar, My Recycle Stuff). Certains entrepreneurs revendiquent dans leur discours les deux aspects (La Ruche qui dit Oui) ;
- Les opportunistes : ces entrepreneurs voient principalement la consommation collaborative comme un nouveau marché et une demande à satisfaire. Un profil jeune, urbain et connecté (Weeleo49, Costockage, TripnCo) ;
- Les convertis : ces entrepreneurs viennent d’horizons professionnels variés et se lancent dans la consommation collaborative (le voyant comme un phénomène incontournable) sans pour autant en posséder l’ensemble des codes ou des clés de lecture (Animal Futé, PiggyBee). Remarque : ces profils doivent être compris comme une clé de lecture permettant de mieux comprendre les dynamiques des marchés de la consommation collaborative. Ils sont volontairement schématiques et ne prétendent ni à l’exhaustivité ni à l’omniscience des cas et de l’analyse
La popularisation de la consommation collaborative et son essor ont pu induire un changement dans les motivations des consommateurs.
En 2013, 77 % des individus voyaient d’abord l’économie collaborative comme un moyen de dépenser moins ou d’augmenter leurs revenus, et seuls 36 % étaient motivés par la volonté de recréer du lien social, d’aider son prochain ou de participer à la sauvegarde de l’environnement14. En France, 63 % des consommateurs recouraient à la consommation collaborative pour « payer moins cher » et 55 % pour « trouver des bonnes affaires ». Il semblerait ainsi que les pratiques de consommation collaborative ne traduisent pas forcément un rejet du système mais plutôt une volonté des consommateurs d’optimiser leur pouvoir d’achat et de consommer autrement, « sur mesure » (flexibilité, personnalisation, etc.).
Il est important de souligner que le développement de la consommation collaborative s’accompagne de différents « effets induits » sur l’économie traditionnelle et ses acteurs : concurrence d’activités existantes, avec le risque de voir des acteurs traditionnels mis sous pression (par exemple les taxis, les chaînes hôtelières, etc.), mais aussi nouvelles opportunités économiques (création de nouveaux marchés, économies de fonctionnement, etc. avec des effets indirects positifs sur l’emploi). Au-delà d’une réflexion strictement centrée sur l’emploi, il apparaît important de souligner les mécanismes de création de valeur ainsi susceptibles d’être « libérés » par le développement de la consommation collaborative.
Le développement de la consommation collaborative s’accompagne d’une modification en profondeur de la notion même d’emploi (au sens de la principale activité économique source de revenus pour un individu ou un foyer).
En effet, au-delà des motivations d’ordre social et environnemental, la consommation collaborative permet aux particuliers « offreurs » de biens et/ou de services d’amortir plus rapidement un bien qu’ils possèdent (une voiture, un logement) mais aussi d’augmenter et de diversifier leurs revenus, avec à la clé un impact positif sur leur pouvoir d’achat (et donc de façon indirecte sur l’économie et le marché de l’emploi en général).
3- NOUVELLES TENDANCES
Il existe en France un formidable gisement pour l’utilisation et l’échange d’objets entre particuliers. À titre d’exemple, chaque foyer français conserve en moyenne 70 objets dont il ne se sert plus. Un constat similaire peut être dressé sur le secteur de la mobilité, lorsque l’on observe que le parc automobile français est composé de plus de 31 millions de véhicules qui ne sont utilisés en moyenne 8 % du temps. Deux mouvements complémentaires favorisent le développement de la consommation collaborative. D’un côté, les Français privilégient de plus en plus l’usage des biens face à leur possession. Ainsi, 83 % des Français déclaraient en 2013 que « l’important, c’est de pouvoir utiliser un produit plus que de le posséder », tandis que 62 % des consommateurs se déclaraient intéressés par un service de prêt de produit ou de matériel créé à l’échelle de leur quartier. Dans un second temps, le rapport à la possession s’oriente de plus en plus vers des biens de seconde vie. Ainsi, 68 % des Français ont déjà acheté un produit d’occasion sur Internet ou dans un vide-greniers, et 49 % des Français indiquent qu’ils « achètent d’occasion à chaque fois que c’est possible».
Les pratiques qui boostent l'économie collaborative :
- Le covoiturage pour des déplacements occasionnels : 35 % des adeptes de cette pratique considèrent que leur recours au covoiturage a augmenté au cours des 12 derniers mois (contre 20 % qui considèrent qu’il a diminué) ;
- L’achat de produits frais à un producteur de manière collaborative (avec La Ruche qui dit Oui ou une Amap par exemple) : 38 % ont augmenté leurs pratique (24 % ont diminué) ;
- Le covoiturage pour des trajets réguliers : 34 % ont augmenté (27 % ont diminué) ;
- Le troc, l’achat, la vente de productions (fruits, légumes) entre particuliers : 34 % ont augmenté (20% ont diminué) ;
- La vente de biens à des particulier : 30 % ont augmenté (23 % ont diminué) ;
- L’achat de biens à des particuliers : 27 % ont augmenté (24 % ont diminué).
Certaines pratiques bénéficient par ailleurs d’un potentiel important, s’évaluant au nombre de répondants ayant déclaré envisager de découvrir la pratique dans les mois à venir. 26 % envisagent ainsi de recourir à la livraison de produits (repas, colis) entre particuliers, 23 % à partager un taxi ou encore 23 % à échanger leur maison/appartement avec d’autres particuliers.
Les pratiques non monétarisées (échange, troc, don) semblent particulièrement propices à l’expérimentation.
On recense notamment l’échange de maison/appartement (les personnes qui échangent leur maison ou appartement font également du covoiturage occasionnel (67 %), régulier (65 %), des repas participatifs (72 %) ou encore du troc/achat de produits alimentaires à des particuliers (62 %), l’habitat participatif et l’échange de voiture. On constate également que les personnes réalisant une pratique dans un secteur donné sont souvent amenées à tester d’autres pratiques de ce même secteur. Par exemple sur le secteur « se déplacer », les personnes faisant de la location de voiture sont enclines à également tester le covoiturage, occasionnel (74 %) ou régulier (68 %), l’échange de voiture (42 %) ou le partage de taxi (50 %)
Contrairement aux idées reçues, la consommation collaborative ne s’adresse pas uniquement aux étudiants, jeunes actifs et aux urbains.
- Les étudiants ont une propension plus importante que la moyenne à effectuer des achats de biens entre particuliers.
- Les urbains sont souvent perçus comme la population la plus concernée par la consommation collaborative. Cependant, les ruraux sont également nombreux à réaliser des pratiques collaboratives. En effet, à l’inverse des urbains, de par leur position géographique excentrée des centres villes, ils sont davantage à pratiquer le covoiturage pour des trajets réguliers et le troc, l’achat et la vente de fruits et légumes (30 % vs 23 %).
- Les familles sont très actives dans les différentes pratiques de consommation collaborative. Le fait d’avoir des enfants semble représenter un facteur incitatif, notamment pour des raisons financières : les principales raisons qui motivent ou pourraient motiver la pratique collaborative des familles sont le besoin de faire des économies (54 % vs 46 %) ou faire durer les objets (21 % vs 17 %).
4- FOCUS SUR QUELQUES SECTEURS
SE DEPLACER
Les enjeux environnementaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre combinée à la hausse du prix des énergies fossiles ont favorisé en France, et plus largement en Europe, l’émergence de formes de mobilité alternatives à la voiture individuelle.
Ces mobilités alternatives peuvent être distinguées en deux tendances :
- le développement de nouvelles mobilités (voitures hybrides ou électriques, réseaux de transport en commun, vélos à assistance électrique (VAE), etc.) ;
- l’utilisation nouvelle de modes existants, comme la location de véhicule entre particuliers ou le covoiturage par exemple.
Au sein de ces mobilités alternatives, on assiste depuis le milieu des années 2000 à l’émergence d’une tendance visant à privilégier l’usage à la possession.
Parmi ces différents modes figurent :
- le covoiturage : partage d’un véhicule entre plusieurs particuliers pour réaliser un trajet donné ;
- les Véhicules de Transport avec Chauffeur (VTC) entre particuliers : utilisation conjointe et organisée d'un véhicule, par un conducteur non professionnel et un ou plusieurs tiers passagers dans le but d’effectuer un trajet commun ;
- la location de modes de transport motorisés (véhicules) ou doux (vélos) entre particuliers ;
- l’autopartage et le vélopartage : systèmes dans lesquels un acteur privé ou public met à disposition de « clients » un ou plusieurs véhicules.
Le covoiturage apparait de loin comme la pratique la plus populaire.
Alors que 21% des Français avaient déjà exercé cette pratique en 2013 ils étaient près de 25 % à l’avoir essayé de manière régulière et occasionnelle en novembre 2014. Ils étaient également de 26 à 28 % à envisager de le pratiquer dans les mois à venir, portant la proportion à plus d’un Français sur deux.
UTILISATEURS
Il semble que la catégorie des jeunes urbains de 18 à 25 ans soit majoritaire parmi les utilisateurs des plateformes de mobilité collaborative. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce constat, et notamment le fait que les formes de mobilité partagée démultiplient les possibilités de déplacements sans qu’il soit nécessaire de posséder un véhicule. Elles sont donc plébiscitées par les jeunes qui disposent de peu de moyens financiers et sont rarement propriétaire d’un moyen de transport. Ainsi, 92% des membres de cette catégorie d’âge placent l’argument économique en tête de leurs préoccupations lorsqu’ils ont recours aux plateformes de la consommation collaborative.
OFFREURS
Les particuliers offreurs sont pour la majorité des hommes, âgés de 18-34 ans, appartenant à la catégorie socioprofessionnelle des cadres supérieurs (CSP+) et vivant en milieu rural. Ces particuliers ont tendance à utiliser les réseaux sociaux très fréquemment et à pratiquer la consommation collaborative très régulièrement en tant qu’offreur. En termes de complémentarité des pratiques, ils déclarent avoir déjà partagé un taxi et échangé leur voiture. La consommation collaborative représente une expérience authentique, un modèle différent et une manière de se préoccuper de l’environnement tout en générant un revenu supplémentaire
Le parc automobile français comptait au 1er janvier 2014 plus de 38,2 millions de véhicules, ce qui donne à la France l’un taux d’équipement en automobile les plus élevés d’Europe, avec en 2009, 83% de la population française vivant dans un ménage possédant au moins une voiture. Cependant la France possède également un taux d’occupation moyen des véhicules parmi les plus bas d’Europe.
Une autre dimension favorisant l’essor de pratiques collaboratives dans le secteur de la mobilité est le coût d’entretien d’un véhicule, estimé à plus de 4 300€/an.
La seule initiative de VTC entre particulier, UberPOP, a été pensée comme une forme de covoiturage citadin par l’entreprise Uber, une offre similaire à ce que peuvent proposer des plateformes de covoiturage dynamique comme Djump.
UberPOP, lancée en février 2014, est pour l’instant présente dans six villes en France, notamment Paris, Bordeaux, Lyon et Lille. Uber modifie régulièrement sa tarification, son mode de rémunération des chauffeurs et son système de commissions. Pour faire face à la compétition et aux compagnies de taxis qui tentent de s'aligner sur leurs prix et proposer des services équivalents, les tarifs facturés par Uber ont tendance à baisser. Cependant, la hausse du tarif en période de pointe, peut faire grimper la facture rapidement ; beaucoup plus que dans un taxi classique. La commission prélevée par Uber sur toutes les courses est de 20 %, mais des primes existent en France pour les chauffeurs les mieux notés par les passagers et qui acceptent un maximum de courses111. Uber, Drive et Lecab sont les acteurs leaders sur le segment des VTC en France. En dehors de ces acteurs, il existe de nombreux « artisans », notamment en Île-de-France112. Cependant, Uber est la seule plateforme de VTC à proposer un service de VTC entre particuliers avec UberPOP113. Il semble cependant que ce service connaisse certaines difficultés du fait de la réglementation en vigueur en France114.
La suppression du service UberPop a fait des dommages collatéraux.
Djump, start-up belge d’autopartage, a cédé : elle annonçait vendredi 30 juillet son rachat par la société de VTC Chauffeur-Privé. Un grand coup porté à l’autopartage, qui malgré une opinion publique enthousiaste, doit obéir aux lois économiques et aux invectives politiques.
S'EQUIPER
Le fait de s’équiper en utilisant des biens de seconde main, acquis sur le marché conventionnel par d’autres particuliers, relève de pratiques très anciennes, fortement ancrées dans les habitudes des Français et qui font partie du patrimoine commun (brocantes, vide-greniers ou braderies.). Chaque année par exemple, plusieurs milliers de brocantes sont organisées en France, d’importance très variable. Certaines rassemblent des centaines de milliers d’acheteurs, comme la braderie de Lille, qui constitue le plus grand marché aux puces d'Europe avec plus de 10 000 exposants installés sur plus de 100 km de trottoir et plus de deux millions de visiteurs ; ou la braderie de Rennes avec près de 4 000 exposants et 400 000 visiteurs.
Selon l’enquête Nomadéis/TNS Sofres, 70 % des Français ont ainsi consommé un bien durable de manière collaborative en 2014
La consommation collaborative de biens durables donne en effet aux ménages l’opportunité d’utiliser des produits de qualité à moindre coût.
Toutes les catégories d’objets sont concernées par la consommation collaborative mais plus particulièrement celles qui impliquent un coût d’acquisition élevé et un manque d’offres de reprise/garanties de la part des acteurs conventionnels (mobilier notamment).
Cet aspect prend une importance grandissante avec la prolongation de la crise économique et l’installation d’un contexte économique dans lequel le pouvoir d’achat des ménages est soumis à de nombreuses pressions.
La consommation de biens durables entre particuliers a par ailleurs été particulièrement impactée par la démocratisation des NTIC et d’Internet. Les outils numériques ont permis de démultiplier l’impact et l’ampleur du secteur de l’équipement collaboratif. Au contraire des braderies ou vide-greniers, caractérisés par leur caractère ponctuel, les plateformes numériques rendent continuellement possible la transaction entre particuliers et démultiplient les possibilités de mise en relation, élargissant de ce fait le cercle d’offreurs et de demandeurs potentiels.
Le secteur « s’équiper » est segmenté selon une approche par type de transaction entre particuliers et par type de contrepartie :
- avec contrepartie monétaire : on regroupe dans ce segment les activités d’achat/vente et de location de biens entre particuliers. Ce segment accueille les poids lourds du secteur, des plateformes de mise en relation des particuliers telles que Leboncoin, eBay, Priceminister, etc. ;
- avec contrepartie réelle : ces acteurs sont des plateformes d’échange et de troc328 d’objets entre particuliers telles que My Recycle Stuff
- sans contrepartie : on trouve sur ce segment les plateformes collaboratives proposant à des particuliers de donner ou de partager leurs biens avec d’autres particuliers.
Le type de relations entre les membres et l’importance conférée à la communauté varient fortement selon le type de pratique.
Concernant le segment des pratiques avec contrepartie monétaire, l’accent est plutôt mis sur la praticité : l’objectif est de trouver un objet (et non une personne) qui corresponde à ses attentes, près de chez soi et à bas prix. Le type de garanties attendues porte principalement sur la sécurité des transactions financières (critère cité par 40 % des utilisateurs du secteur « s’équiper ») et l’existence de systèmes de recours ou de compensation de type assurance, service après-vente, etc. (mentionné par près d’un répondant sur trois). Concernant les segments avec contrepartie réelle ou sans contrepartie, une volonté forte de créer des liens entre individus semble se dégager. De nombreuses plateformes de troc/échange comportent ainsi une dimension de réseau social, cherchant à favoriser les contacts et les rencontres entre individus et à prolonger l’échange au-delà de la transaction de biens.
Les plateformes de don ou de prêts d’objets entre particuliers ont tendance à s’organiser sous la forme de réseaux sociaux locaux, dans le but de favoriser le développement de relations d’entraide et de convivialité. La situation est particulièrement vraie pour les plateformes de prêts, qui nécessitent pour fonctionner de générer une certaine dynamique entre les prêteurs/receveurs.
Il existe une forte variation des pratiques selon la catégorie de biens proposés.
Ainsi, si les produits électroménagers, électroniques, informatiques et audiovisuels sont très majoritairement vendus et achetés, le don occupe une place beaucoup plus importante dans la catégorie des meubles et des jouets, tandis que le prêt, le partage et l’échange sont des pratiques assez courantes pour les produits et outils de jardinage/bricolage.
SE FAIRE AIDER
Le secteur des services entre particuliers regroupe des activités très variées, qui peuvent être rattachées au secteur des services à la personne.
On recense des activités liées aux services à la famille (garde d’enfants, soutien scolaire, assistance informatique à domicile, etc.), aux services de la vie quotidienne (entretien de la maison et travaux ménagers, petits travaux de jardinage ou de bricolage, etc.) et à d’autres types de services répertoriés dans la catégorie « services aux personnes dépendantes ».
On pense bien sur à solliciter des individus appartenant à des cercles proches (familles, amis, voisins, etc.), sans que le service ne fasse l’objet d’une rétribution monétaire. Ces services s’inscrivent principalement dans une dynamique de réciprocité et de création/renforcement de liens sociaux.
Ce secteur concerne le fait, pour un individu, de bénéficier des compétences ponctuelles d’une autre personne sans qu’il ne connaisse nécessairement cette dernière au préalable. On distingue 3 segments en fonction du type de contrepartie présidant aux transactions :
- Avec contrepartie monétaire : la mise en relation de l’offreur et du demandeur s’effectue de différentes façons, la plus populaire étant, traditionnellement, via un système de petites annonces diffusées par des canaux locaux (affichage dans des commerces de proximité, dans les mairies, publication dans des journaux locaux, etc.). Le système connait cependant une évolution importante avec le développement d’Internet et la création de plateformes qui permettent à un particulier de proposer ses services à un autre particulier en étant rémunéré. Les plateformes hébergeant ces « places de marché virtuelles » peuvent être généralistes (ex : Leboncoin) ou dédiées spécifiquement aux services (ex : Jemepropose). Les services entre particuliers effectués contre rémunération sont souvent désignés sous l’appellation « jobbing ».
- Avec contrepartie réelle : ces pratiques sont basées sur des échanges de services entre particuliers. Certaines plateformes utilisent un système de monnaie virtuelle servant d’étalon pour les différentes prestations réalisées. Par exemple l’Accorderie a adopté un système de « banque de temps » selon le principe « une heure de service rendu vaut une heure de service reçu », quels que soient le service rendu et les compétences exigées.
- Sans contrepartie : ces initiatives portent plutôt sur des réseaux locaux d’entraide. Les particuliers s’appuient sur des communautés, souvent organisées sous un aspect géographique, pour des partages de bons plans, conseils, des apprentissages etc. (ex : Repair café) Les services sont réalisés gratuitement, la seule condition consistant pour le bénéficiaire à assister/participer au service rendu pour monter en compétence et pouvoir à son tour, éventuellement, aider d’autres participants.
OFFRE et DEMANDE
Le plus souvent, les propositions de services sont centrées autour de la garde d’enfants, des réparation et travaux ainsi que du soutien scolaire ; alors que les demandes concernent majoritairement des activités de réparation et travaux, de jardinage et de tâches ménagères.
Selon les résultats de l’enquête Nomadéis/TNS Sofres de novembre 2014, les prestations de services entre particuliers se répartissent de manière égale entre transactions payantes/rémunérées et transactions gratuites. Parmi les répondants indiquant réaliser ces prestations de manière gratuite, près de 45 % indiquent qu’il s’agit de prestations effectuées contre un échange et/ou troc de services (soit 25 % des répondants au total). Ces résultats confirment et amplifient la tendance détectée par d’autres études menées les années précédentes. Selon une étude menée par 60 millions de consommateurs en 2013, 16 % des personnes interrogées pratiquaient le troc des biens/services avec d’autres particuliers et 11 % déclaraient appartenir à des réseaux locaux d’entraide. (83 %) des personnes interrogées se montraient par ailleurs favorables à ces réseaux d’entraide et environ 50 % d’entre eux considéraient que la pratique allait se développer à l’avenir
Facteurs explicatifs
L’essor des NTIC et d’Internet a tout d’abord permis de démultiplier les possibilités de mise en relation et d’élargir le cercle d’offreurs et de demandeurs potentiels.
En parallèle, la hausse du taux de chômage et la pression sur le pouvoir d’achat des ménages (selon l’Insee, le taux de chômage au sens du BIT s’élève aujourd’hui à 10,4 % de la population active en France alors qu’il était de 9,5 % en 2012) consécutives à une conjoncture économique difficile ont contribué au développement d’initiatives visant à réaliser des économies (demandeurs) et à diversifier ses sources de revenus (offreurs), tout en créant du lien social. Le nombre de demandeurs d’emploi en activité réduite a en effet augmenté de près de 50 % entre 2009 et 2013, et plus de 2 millions de salariés à temps partiel sont en recherche de complément de revenus .
Face à ces évolutions sociétales, des start-up ont émergé et ont proposé aux particuliers de monétariser leurs compétences dans des domaines très variés (bricolage, tâches ménagères, garde d’animaux, etc.).
Le mouvement a débuté aux États-Unis à partir de 2008 avec la crise des subprimes, avec des plateformes telles que TaskRabbit393, qui sont devenues des acteurs économiques de référence dans le secteur des services entre particuliers. En 2014, TaskRabbit comptait environ 1 million d’utilisateurs aux États-Unis. Le phénomène s’est progressivement étendu et des plateformes sont apparues sur le marché français à partir des années 2010. Les premiers acteurs d’envergure jouant le rôle (simplifié) d’intermédiaires ont été des plateformes généralistes telles que Leboncoin.
Un succes
600 000 nouvelles offres de services ont été postées chaque jour sur le site Leboncoin en 2013, et 18 000 heures de travail ont été effectuées sur YoupiJob la même année, soit 12 équivalents temps pleins, pour un revenu moyen de 220 euros par mois.
41 % des particuliers déclaraient avoir déjà proposé leurs services à d’autres particuliers et 33 % avoir déjà sollicité des services auprès d’autres particuliers. Environ 25 % des sondés indiquaient par ailleurs que leurs pratiques avaient augmenté au cours des 12 derniers mois.
5- QUELLES PERSPECTIVES ?