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Le livre
Partout dans le monde, des mouvements contestent l'appropriation par une petite oligarchie des ressources naturelles, des espaces et des services publics, des connaissances et des réseaux de communication. Ces luttes élèvent toutes une même exigence, reposent toutes sur un même principe : le commun.
Pierre Dardot et Christian Laval montrent pourquoi ce principe s'impose aujourd'hui comme le terme central de l'alternative politique pour le XXIe siècle : il noue la lutte anticapitaliste et l'écologie politique par la revendication des « communs » contre les nouvelles formes d'appropriation privée et étatique ; il articule les luttes pratiques aux recherches sur le gouvernement collectif des ressources naturelles ou informationnelles ; il désigne des formes démocratiques nouvelles qui ambitionnent de prendre la relève de la représentation politique et du monopole des partis.
Cette émergence du commun dans l'action appelle un travail de clarifi cation dans la pensée. Le sens actuel du commun se distingue des nombreux usages passés de cette notion, qu'ils soient philosophiques, juridiques ou théologiques : bien suprême de la cité, universalité d'essence, propriété inhérente à certaines choses, quand ce n'est pas la fin poursuivie par la création divine. Mais il est un autre fil qui rattache le commun, non à l'essence des hommes ou à la nature des choses, mais à l'activité des hommes eux-mêmes : seule une pratique de mise en commun peut décider de ce qui est « commun », réserver certaines choses à l'usage commun, produire les règles capables d'obliger les hommes. En ce sens, le commun appelle à une nouvelle institution de la société par elle-même : une révolution.
qu’est-ce que les communs ?
Valérie Peugeot, vice-présidente du Conseil national du numérique, définit les communs ainsi : « Avec l’expansion des technologies du numérique, des pratiques de partage, de co-construction de ressources, d’échange en pair à pair se multiplient. Elles s’appuient sur des communautés auto-organisées, qui font le choix de gérer ces ressources sans les soumettre à des droits de propriété. Ces Communs, ou Biens Communs, entendent proposer une alternative économique autant que politique aux modes de régulation traditionnels institués à travers le marché et l’État ». Rappelant les travaux d’Elinor Ostrom, chercheuse en sciences politiques et fondatrice de l’école de Bloomington mais également de ceux qui ont pensé les communs depuis quelques décennies, Valérie Peugeot les résume à travers leurs trois dimensions essentielles : les communs sont (i) des ressources (ii) soumises à un régime collectif de droits et d’obligations et (iii) dont l’usage est gouverné par une communauté. « Impossible donc de comprendre ce qu’est un commun sans prendre en compte ces trois dimensions – ressource, régime collectif, gouvernance – et leur articulation, qui passe par l’action de « mettre en commun », ce que les anglo-saxons appellent « commoning ». Ceci explique que les anglo-saxons préfèrent le terme de Commun à celui de Bien Commun. Le terme « Bien Commun » tend à mettre l’accent sur le bien, donc sur la ressource, alors que Commun seul permet d’englober les trois dimensions mentionnées précédemment et insiste sur la dynamique collective plus que sur la ressource ».
En savoir plus : https://jeromegiustiblog.wordpress.com/2015/11/14/axelle-lemaire-a-rate-les-communs/