
Le magueulisme
Inventer un langage idiosyncratique, aujourd’hui, c’est essentiel. On se crée une identité, une marque de fabrique. En société, ça permet de se distinguer.
Prenons un exemple: « Tu vas bien ? »/ « Toucanos ». Et paf, vous avez un personnage atypique. Ses éléments de langage en font un être « à part », presque inaccessible, donc séduisant.
Heureusement, pour les plus flemmards, je suis là. Si vous n’avez pas le courage de chercher des expressions capilotractées, de vous forger un Ethos loufoque, que vous ne voulez pas passer votre vie à sous-titrer vous même chacune de vos conversations, pas de panique, Carmen arrive à la rescousse.
Pour inaugurer cette première chronique, par quoi commencer ? Quel mot inventé, quel expression, mérite d’y figurer ?
Il me semble naturel de démarrer par le « MAGUEULISME ».
Qu’est-ce que le MAGUEULISME ? Un concept qui sied à merveille à une société où l’image est plus importante que le sujet qui la renvoie (et lui met un jolie filtre sur Instagram pour obtenir un max de likes), où l’auto-promotion sur les réseaux sociaux devient un mode de vie.
Le Magueulisme intervient, par exemple, quand l’autre devient une projection de vous-même, que vous l’annexez dans votre sphère cognitive. On peut parler de solipsisme ou d’aliénation égocentrique, mais le magueulisme va plus loin, et sonne moins pédant !
Si on prend ce segment de phrase : « Hey, ça va ma gueule ? », on s’aperçoit que le locuteur s’adresse à son interlocuteur comme s’il se parlait à lui-même. Ainsi, avec le magueulisme, vos dialogues se font comme devant un miroir. Après ça vous ne direz plus jamais « ma gueule » aux frère Bogdanoff ou à Mimi Mati. C’est positif. Bref, le magueulisme annihile jusqu’à l’existence de l’autre.
Mais le magueulisme, c’est aussi l’art de se mettre en avant, de parler haut et fort, de mettre ses couilles rhétoriques sur la table. Avec le magueulisme, l’univers entier doit passer par le prisme de votre petite personne, et franchement, c’est pas dégueux.
Comment l’utiliser ? Le magueulisme en contexte, ce n’est pas si compliqué.
On peut imaginer par exemple une conversation entre Cendrine, consultante en communication, et Jordan, DJ freelance qui lance une marque de baskets biodégradables faites par des enfants kurdes dans une cave de la rue Custine, Paris, 75018.
« Attends mais moi, dit Cendrine en se recoiffant, mon chef d’équipe me reproche mon magueulisme… mais franchement est-ce qu’il y a quelque chose de plus important que moi ? »
Et bonne nouvelle, le magueulisme se décline. On peut parler d’une personne magueuliste, mais également d’une sitation « magueulienne » ou d’un problème « magueulien ».
Alors, convaincus ? Le magueulisme, on l’aime, on l’essaie, on ne s’en passe plus… Il fond en bouche et laisse une haleine fraîche. Le futur tic tac de toutes vos conversations mondaines.
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