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1- Le crash des grands groupes de communication (©AFP / 20 mars 2018 12h12)
"A l'issue d'une année 2017 difficile, les grands groupes de communication mondiaux doivent faire évoluer leur modèle face à des clients qui ne les considèrent plus comme les intermédiaires obligés pour communiquer à l'ère du numérique.
La croissance des groupes de publicité et marketing, qui suivait bon an mal an celle du PIB, décroche, et la capitalisation des quatre grands du secteur (WPP, Omnicom, Publicis et Interpublic) a perdu 17% l'an dernier.
John Wren, le PDG du leader américain du secteur Omnicom, a reconnu également que "2017 a été une année mouvementée pour les industries du marketing et de la publicité" lors de la présentation des résultats annuels de son groupe: le bénéfice net a cédé 4,9% à 1,088 milliard de dollars pour un chiffre d'affaires de 15,274 milliards de dollars (+1%).
2 - Les enjeux de la réinvention ?
Pessimiste sur la situation globale, le cabinet Forrester prévoit dans une étude la disparition à moyen terme de la moitié des agences et la constitution d'un « cimetière d'agences, jonché des plus vieux noms du secteur », un secteur en 2017 de 36 milliards d'euros investis par les annonceurs dans leur communication (source).
Les grands groupes de communication mondiaux doivent faire évoluer leur modèle face à des clients qui ne les considèrent plus comme les intermédiaires obligés pour communiquer à l’ère du numérique.
La croissance des groupes de publicité et marketing, qui suivait bon an mal an celle du PIB, décroche, et la capitalisation des quatre grands du secteur (WPP, Omnicom, Publicis et Interpublic) a perdu 17% l’an dernier.
John Wren, le PDG du leader américain du secteur Omnicom, a reconnu également que “2017 a été une année mouvementée pour les industries du marketing et de la publicité” lors de la présentation des résultats annuels de son groupe: le bénéfice net a cédé 4,9% à 1,088 milliard de dollars pour un chiffre d’affaires de 15,274 milliards de dollars (+1%). (©AFP / 20 mars 2018 12h12)
Un nouveau groupes de communication affiche une ambition féroce pour les prochaines années : « Figurer parmi les leaders mondiaux de l’optimisation des campagnes de marketing digital, grâce à une utilisation pertinente et ciblée des données, aux côtés de groupes tels qu’Accenture, Deloitte, et le groupe S4C de Martin Sorrell, indique Marc Ladret de Lacharrière aux « Echos ». Déterminé à « disrupter » l’univers du marketing numérique, la holding de Marc Ladreit de Lacharrrière fusionne sa filiale Tradelab avec le londonien Jellyfish pour donner naissance à un groupe valorisé 580 millions d’euros.https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/fimalac-penetre-en-force-sur-le-marche-du-marketing-digital-1145675
Si les grands groupes de communications ne peuvent évoluer que face à un ennemi… Leur enemi est probablement les cabinets de consulting avec Accenture en tête.
Le Top 10 des agences digitales aux UK par revenu en 2017
- Accenture Interactive: £284,660,000
2. SapientRazorfish: £197,782,000
3. IBM iX: £195,930,000
4. Atos Digital Services: £139,000,000
5. EPAM Systems Ltd: £104,000,000
6. BAE Systems Applied Intelligence: £91,069,939
7. DigitasLBi: £76,462,000
8. Amaze: £68,400,000
9. AKQA: £62,591,074
10. Engine: £59,506,000
Accenture a été placé en tête du classement à nouveau par Advertising Age en 2019 avec une croissance de 30% et ses $8.5 Billion de dolars sur l’année fiscale 2018. https://newsroom.accenture.com/news/accenture-interactive-ranked-worlds-largest-digital-agency-network-by-advertising-age-in-annual-agency-report-for-fourth-year-in-a-row.htm
Accenture Interactive a racheté dix agences à travers le monde. Dont des petites pépites créatives comme The Monkeys, la londonienne Karmamara, et Rothco (source)
Depuis 2004, 70 agences de Design ont été rachetées par des Cabinets de Conseil et des Agences de Branding (John Maeda, Design in Tech Report 2017). Parmi les exemples plus connus: la toute récente acquisition de Frog par Altran, Cap Gemini et Backelite; Publicis et Nurun; PWC et Nealite; Accenture et Fjord; Capital One et Adaptive Path; McKinsey et Lunar …). On peut se demander si le Design ne serait pas en train de remplacer le “Conseil” au sens classique du terme (source)
Une perception immuable des groupes de publicité comme prisonniers de leur positionnement traditionnel
Voici le constat de Pierre Reboul. CEO d’EBG & La Transition maintenant “Il apparaît clairement que les annonceurs rechignent à commander aux groupes de publicité des prestations dans le domaine de la transformation digitale, du commerce électronique, de l’UX, de la relation client et même de la publicité digitale. Le plus souvent, ils préfèrent se tourner vers les géants du conseil pour les grands projets de transformation et vers des sociétés plus petites, mais très agiles et très compétentes, comme Artefact ou Ekimetrics, pour du conseil plus spécialisé. Dans leur esprit, les groupes de publicité sont avant tout des créatifs, des concepteurs de films promotionnels ou des acheteurs d’espace, soit des métiers en déclin, et qui correspondent davantage aux conditions du marché des années 1990 qu’aux projets actuels, dans lesquels le digital joue un rôle central. Un article récent des Echos consacré aux investissements de Fimalac dans le digital (notamment Webedia, Tradelab et Jellyfish) cite Accenture, Martin Sorrell et son nouveau groupe S4C, entièrement composé d’acteurs du digital, mais ne mentionne pas Publicis. Et pourtant, sous la présidence de Maurice Lévy, et encore actuellement sous celle d’Arthur Sadoun, Publicis n’a cessé d’acquérir des sociétés de qualité, notamment Sapient et Epsilon, 100% digitales.”
Le défi de demain c'est de rester une option pour les annonceurs. Pour y parvenir 3 enjeux sont à surmonter.
Une récente étude réalisée par eConsultancy pour la Society of Digital Agencies démontre que : 27% des marques ne travaillent plus du tout avec des agences (contre 13% l’année précédente).
Délivrer une expérience personnalisée massivement à chaque consommateur, ca repose sur 3 points.
Le premier point, c’est l’exploitation des données clients pour cibler personnellement les clients dans les medias. Les datas, c’est le nerf de la guerre car elles permettent d’offrir aux annonceurs des contenus et des expériences ultra-personnalisées. Les grandes marques sont de moins en moins désireuses de les partager avec leurs agences de création. Les agences médias cherchent toutes à se renforcer dans ce domaine crucial pour leur avenir. Cela passe par des acquisitions à coût élevé. En témoigne, par exemple, le rachat, estimé à plus d’1 milliard de dollars, de l’agence Merkle, spécialisée dans la data, le CRM et le marketing à la performance, par Dentsu (source).
Le 2eme point, c’est la capacité de produire du contenu de marque spécialement conçu pour les différents canaux. La communication digitalisée repose sur la diffusion de contenus par la marque au fil de touchs points aussi divers que la TV, le magasin, le produit, une conversation….Plus questions de produire d’un coté les spots TV et de l’autre produire des contenus pour les réseaux sociaux. Ainsi la limite entre les différentes agences et entre les différents métiers est plus que jamais floue : communication, marketing, médias,… Tout le monde se flatte de pouvoir — et de savoir — tout faire.
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Enfin, le dernier point est organisationnel, par défaut c’est le client qui coordonne ses différentes agences incapables de se coordonner sur ses projets…. “Toutes les agences ont subi une “fonte des pôles”, avec la raréfaction des contrats-cadres explique Wale Gbadamosi Oyekanmi CEO de Dare Win. Il y a une accélération des prises de décision et une rotation plus rapide des directeurs marketing. Beaucoup de clients veulent maintenant travailler autour de projets : ils cherchent toujours à construire des marques, mais par l’accumulation de projets. Par exemple, récemment, nous avons eu deux semaines pour créer la campagne d’un client. On s’est mis en mode “war-room” et plutôt que d’échanger par mail, le client est venu à l’agence tous les jours.”(source)
Progressivement, les grands annonceurs,comme Procter & Gamble, Unilever, Mondelez, Air France...ont internalisé leur achat média, en particulier dans le digital et principalement vers Google et Facebook. « Aujourd'hui, calcule tout haut un observateur, 20 à 30 % de l'achat média est géré en direct par les annonceurs. » (source).
Dans un univers de plus en plus visuel, où le mobile est le premier écran des Millennials, les marques produisent et publient seules . Elles savent pouvoir être épaulées dans leur démarche par les géants de l'Internet. A l'image d'un Snapchat, qui a lancé en 2017, son Snapchat Publisher, un outil permettant aux annonceurs d'éditer en self-service des contenus, photos ou vidéos (source)
Les groupes medias se mettent à la production de contenu pour les marques. Ainsi Ganz, « l’agence de content thinking » de Prisma Media, et le 14 Haussmann du Figaro dirigé par Benjamin Lassale, ont été lancés à moins de trois semaines d’intervalle. Dans ces entités, les studios de création de contenu cohabitent avec les rédactions, sans pour autant en faire partie. (source)
3- Modèles de métamorphose inspirants pour les grands groupes
« À l’heure où les cabinets de conseil rachètent des agences de création ou de design, à l’heure où les géants de la pub sont en replis, à l’heure où les agences peinent à se réinventer, nous refusons d’attendre de mourir lentement dans un silo" précise Marion Darrieutort.
Les agences doivent repenser leur métier, leur fonctionnement, leur relation avec leurs clients en profondeur.
Le modèle 0 : Le modèle "usine à contenus" à publier sur une plateforme de publication de type Facebook ou Google ou une DSP chez l'annonceur. Tracking des datas. Test and learn. 100% agile.
Le modèle 1 : Le modèle "boite de prod" qui délivre du brand content à médiatiser. L'agence produit le contenu en anticipants les formats de diffusion. Elle s’appuie ensuite sur des experts media pour chaque mode de diffusion. Son modèle repose sur l'intégration du contenu et du média en exploitant la data media. Exemple 14Hausmann du Figaro . Livrable type : http://media.figaro.fr/toyota-figaromagazine/
Le modèle 2 : L’agence "ultra spécialisée" qui grâce à une expertise sur un sujet (support: application mobile, contenu : social content...., métier : RP...) delivre un système de communication complet sur un enjeu spécifique de l'entreprise. Son modèle repose à la fois sur une expertise métier et la bonne connaissance des besoins d'un interlocuteur identifié dans l'entreprise. Exemple : repositionnement de Elan Edelman
Le modèle 3 : Les groupes de communication "full brand experience" qui délivrent une expérience de marque sans rupture sur tous les canaux. Le modèle repose sur la collaboration des talents des différentes agences spécialisées, réunit dans des hub, en casant les P & L. Mais aussi sur la capacité à coordonner les clients ensemble, en cassant les sillos internes. Exemples : voir ci dessous.
Le modèle 4 : Les "pure players" digitaux qui délivrent des expériences client sans rupture sur tous les points de contacts ...souvent uniquement digitaux, datant de l'ère des sites webs et se réinventant avec l'IOT. Le modèle repose sur la maîtrise du marketing, et des datas client extraites des points de contact digitaux gérés par l'agence (par exemple le site de e commerce). Exemple : Digitas LBI
Le modèle 5 : Les agences "artistiques". Souvent de petite taille, elles innovent dans la technologie, dans les medias, dans l'art. Leur mode opératoire c'est la collaboration en mode projet avec une team sur mesure, très agile. Exemple : Move, une agence pour positionner les artistes du mouvement.
Le modèle 6 : Les agences "business solutions". Souvent liées à un cabinet de consulting ces agences souvent digitales delivrent des solutions business créatives que les cabinets implémenteront chez leurs clients en transformation digitale et/ou sociale. Le modèle c'est celui du lab d'open innovation qui peut aller vers l'accélération ou l'incubation de projets. Leur force c'est de délivrer de l'innovation en alignant idées, projets et organisation (et business). Exemple : accenture interactive Livrable type : BrandTech TV, créé en partenariat avec Accenture Interactive
Le Modèle 7 : "Let's fall in love, again, and again". Proche dans la taille et l'esprit d'une start up créative, collaborative, et agile. Elle travaille souvent sur un projet pour le client, sur une période donnée, pour réaliser un coup. Son point distinctif c'est de collaborer étroitement avec le client, voire de co créer avec lui. Exemples : "Dare win ou l’évolution accélérée de l’espèce « agence »
Le Modèle 8 : "La boutique agency". L'agence de petite taille, qui souhaite rester accessible et agile pour ses clients...Mais les clients grandissent et partent à l'international... Les boutique agencies actuelles sont souvent spécialisées TV ou event (modèle 2).
Le modèle 9 : Voir l'exemple de R9 ci dessous. Pas de lab, de hub ou de consulting. Une méthode qui permet aux talents de se coordonner : le design d'expérience.
Le modèle 10 : le nouveau modèle intégré "contenu + media". A l'instar du mariage Marcel + Blue 449, les deux agences du groupe Publicis se rapprochent pour créer une offre liant intimement média et créa.
3- Comment j'ai réinventé un groupe de communication ? (2015)
J'ai été recruté comme directeur du planning stratégique d'un groupe de communication qui était à construire en créant des synergies entre les agences. Mon rôle était de concevoir des plateformes de communication et faire travailler ensemble les talents des différentes agences pour les vendre et les délivrer.
R9, c'est une holding qui, en cinq ans, a racheté 85 agences de communication et marketing, pour employer au total près de 250 salariés.
Le Vaisseau, le siège de R9, un bâtiment conçu par Jean Nouvel est le symbole de la grande ambition des dirigeants de R9, les frères Olivier et Xavier Baillet et Nicolas Bianciotto.
Il s'agissait de construire une « Alliance » d’agences « post-digitales » aux compétences variées réunies autour de l'agence digitale d'origine des frères Baillets.
Le rapport d'experience complet est ici :
La vision : le design d'expérience...
L’expérience client est, par erreur, envisagée comme la somme de toutes les rencontres d’un client avec un produits et un service. En fait, l'expérience client résulte à la fois de la valeur perçue communiquée par la marque et de la qualité des moments vécus par le client / usager.
Tout est expérience : la mission sociale de l'entreprise, la création d'un service, le brand content de la marque sur mobile, les espaces de rencontre du magasin, le nouveau format de réunion, le logiciel de collaboration inter services...
C'est une bonne façon d'aligner communication, marketing et media dans un parcours client fluide.
Les 3 axes de la transformation:
Le premier point crucial était la data. C'est une nouvelle façon de penser qu'il m'a fallu diffuser en interne : collecte des données, culture de l'objectif, de la mesure, et de l'amélioration rapide en fonction des résultats.
Le deuxième point important, le brand content. Produire à plusieurs agences du contenu de marque pour les différents canaux passe par réunir les créatifs, les DA, les concepteurs rédacteurs dans un pool central. D'un point de vue pratique j'ai lancé un format de brief nouveau : un brief créatif unique pour le pool de créatifs et un brief sur les moyens de diffusion diffusé auprès de chaque agence.
Le dernier point, le point organisationnel a été complexe. Nous avons réunis les agences en pôles métiers en anticipant l'impact du digital et la marge de progression de chaque métier. De facon pratique nous avons monté des teams d'agences configurables en fonction des enjeux des briefs clients.
La mise en place de facebook at work a permis aux collaborateurs échangent et s'organisent en réseau de façon autonome.
L'agence post digitale
Les gains :
- Du new biz : 2 millions de gain de budgets sur mes 2 ans
- De la fierté : Les expériences NANA, Rugby Europe ont été des succès de l'agence (et pour les clients)
- Une nouvelle façon de travailler : les propositions Oscaro.com et Nouvelles Frontières ont mobilisé jusqu'a 10 agences du groupe, fières d'être en finale après avoir battu d'autres groupes
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