Le 18 juin 2021 s’est tenue la 15e convention Esprit de Service France, en physique et digitale, ayant pour thème et titre « RE-BON-DIR ».
Rebondir comment ? Rebondir sur quelles bases ? Rebondir avec quelles stratégies ? #facteurhumain
« Rebondir en faisant du facteur humain un atout » – L’alliance pour le GIECO. Le Lab’ ESF, partenaire du GIECO ; Table ronde réunissant Agnès Baillot, Secrétaire générale Esprit de Service France ; Jacques Fradin, Président du GIECo, IPBC, Directeur scientifique Institut de Médecine Environnementale ; Jean-Baptiste Leroy, Responsable Marketing, Groupe LSDH ; Jérémy Dumont, Community Experience Design & Impact, SBT Human(s) Matter ; animée par Nandini Colin, Déléguée Internationale Esprit de Service France.
Le GIECo, regroupe différents experts pour traiter de tous les sujets liés au comportement. Esprit d’équipe, état d’esprit, confiance, transparence dans le rapport avec les clients, entreprise à mission, raison d’être, besoin de sens… : plus que jamais, les thèmes liés au comportement sont de première importance.
Jacques Fradin est médecin de formation, comportementaliste et travaille sur les liens entre les disciplines, notamment les neurosciences et les domaines pratiques comportementaux, dont les facteurs humains dans l’entreprise.
Aujourd’hui, le facteur humain est partout et nulle part. D’où l’idée de faire un GEIC, non pas pour le climat, mais pour le climat social au sens large ; avec pour objectif de dresser des rapports exhaustifs de toutes les disciplines et de sortir des connaissances croisées et robustes pour produire des livrables opérationnels, co-développés avec des scientifiques et des acteurs de terrain (rapport consultable sur www.ipbc.science.fr)
Une ambition : regrouper les acteurs de tout ordre avant que le facteur humain ne nous déborde, car tout change très vite et nous n’avons plus le temps de nous adapter.
Jean-Baptiste Leroy est l’un des responsables de l’entreprise familiale LSDH. Celle-ci, comme toute entreprise doit faire face à de nombreux changements économiques, écologiques, sociaux et industriels (en peu de temps, l’entreprise est passée de 250 à 2000 salariés).
La collaboration avec le GIECo a commencé peu de temps avant la crise sanitaire. Elle est devenue un véritable laboratoire scientifique face aux problématiques de télétravail et de réorganisation du travail qu’il a fallut tester en interne.
Le facteur humain est essentiel, il impose de prendre en compte les hommes et leur problématique et faire partie du GIECo c’est en être aux premières loges. Cela permet d’expérimenter mais également de tirer l’enseignement des premières recherches et de les appliquer en entreprises.
On constate que les solutions existent, mais que le facteur humain est souvent bloquant. Il s’agit donc de savoir comment trouver les leviers pour le transformer en atout et progresser.
Co-organisateur de Marches pour le Climat et fondateur de l’association « Nous sommes vivants », Jérémy Dumont a rejoint dernièrement Humans Matter, adhérent au GIECo.
La démarche du GIECo est particulièrement remarquable dans le sens où elle met en avant la transversalité dans le monde scientifique.
Il souligne : nous avons besoin de toutes les sciences humaines en renfort pour nous aider à ouvrir des perspectives pour demain en mettant l’humain au cœur.
Jacques Fradin précise le partenariat avec l’Association : l’ADN d’ESF est constitué du facteur humain, de la curiosité et de l’exploration et le thème du jour : « Rebondir » s’inscrit dans cela. Pour lui, la crise n’est pas un destin qui nous tombe dessus, mais un décalage entre le terrain et la gestion du terrain, qu’il s’agisse de santé, de management ou de gouvernance.
La crise actuelle offre l’opportunité de se poser la question du facteur humain.
En l’occurrence, de la même manière que nous effectuons des gestes automatiques lorsque nous conduisons et qu’il suffit d’un imprévu pour passer en mode adaptation, les entreprises doivent passer en Système 2, à savoir s’adapter, et favoriser cette compétence. Les modes de management sont antinomiques, dans une symétrie avec d’un côté la routine et de l’autre la curiosité, la persévérance et l’adaptation, la binarité et la nuance, l’arbre décisionnel et la relativité.
Jacques Fradin précise le concept de nudge en prenant l’exemple du don d’organe. Auparavant, le donneur devait avoir donné son accord en cas de mort accidentelle prématurée. Et donc, de fait, peu nombreux. En 1976, le paradigme change et nous sommes devenus tous donneur à moins d’en avoir explicitement exprimé le refus.
Le taux est ainsi passé de 10 à 70% !
Il n’y a pas de bon ou de mauvais nudge ; l’objectif étant de raccourcir la distance entre ce que pense, ce que l’on veut et ce que l’on fait.
Il précise : lorsque les sociologues du GIECo analyse pourquoi les individus font et ne font pas, le résultat n’est jamais celui attendu ! Des lors qu’on met en application ce que l’on comprend, tout fonctionne mieux ! Citant Einstein : « un problème insoluble est un problème mal posé » …
Nandini Colin aborde le thème de la rencontre entre un projet individuel et un projet collectif. Comment celle-ci fait-elle bouger les comportements et permet-elle de rebondir ?
Pour Jérémy Dumont, la complexité qui nous fait face relève d’enjeu à la fois économique, sociaux et environnementaux. Et de fait, la prise de conscience et le passage à l’acte prennent du temps. Et dans ce processus, la dynamique collective reste essentielle.
Pour Jean-Baptiste Leroy, le consommateur est dans une schizophrénie perpétuelle : tout le monde veut manger bio et éthique… Mais dans la réalité, tout le monde veut aussi payer le moins cher possible. Nous sommes tous d’accord avec les grandes évidences, mais dès que nous retournons dans notre individualité, nous adoptons un comportement plus égoïste et nous oublions certaines valeurs.
Comment arriver à une véritable évolution ? En apportant du sens, semble être la réponse la plus évidente …C’est l’exemple « C’est qui le Patron ? » dont le concept protège le producteur agricole en impliquant le consommateur.
Cependant, lorsque le projet a été initié, il a soulevé pas mal de doutes de plusieurs laiteries. C’est là encore une bonne illustration du facteur humain face à l’inconnu.
Aujourd’hui, la marque vend 50 millions de briques par an, avec un concept qui relève à peine du marketing. En s’enfermant dans des certitudes, nous passons à coté d’énormément d’opportunités ! La logique du « REBONDIR » implique justement de sortir de sa zone de confort. Quand on parvient à inverser le paradigme, on en crée de nouveaux, et c’est précisément ce que nous avons besoin de faire.
En réponse a une question de la salle sur l’impact des réseaux sociaux et leur capacité à faire de l’instantané et de l’universel, Jacques Fradin s’interroge : pourquoi est-il possible d’y rester anonyme et d’y exprimer des propos que la loi empêche de tenir dans la rue ? Ce sont les conditions idéales du dérapage ! Mais d’un autre coté, internet permet de tisser des liens extraordinaires …
Peut-être faut-il une culture ou une loi adaptée ? Quoiqu’il en soit le facteur humain n’est pas un problème en tant que tel. Nous sommes à un virage et nous devons tourner, voilà tout !
Et de conclure : le monde économique est un levier majeur de changement. Le Baromètre Edelman, qui traduit le niveau de confiance des citoyens vis-à-vis des organisations en général, montre que l’entreprise tire son épingle du jeu grâce à la confiance de ses employés. C’est un véritable atout sur lequel il faut rebondir et miser.
Esprit de Service France – Novembre 2021
jeremy dumont