Pour lutter contre ces envahisseurs qui nous ressemblent, David Vincent dispose d'un seul indice : le petit doigt des envahisseurs. Ils ne peuvent pas le plier. La science fiction est allée plus loin pour nous faire réfléchir à notre (in)humanité.
La science fiction pour comprendre notre humanité
Dans Blade Runner de Philip K. Dick la présence de répliquant sur Terre est chose illégale, et c'est du rôle de Deckard, fameux « blade runner », d'en venir à bout. Ce qui est d'amblée intéressant dans ce film au sujet de l'essence humaine, c'est qu'on accompagne un spécialiste pour démasquer les « faux humains ». Tests de logique, test de morale, tests émotionnels, Deckard n'a pas son pareil pour cerner le vrai du faux : la nature humaine n'a pour lui plus aucun mystère.
Dans 2001, l'Odyssée de l'espace, la confrontation entre Bowman et HAL, son puissant ordinateur doté d'intelligence artificielle, vise à chercher ce qui relève de l'humain de ce qui relève de l'illusion d'humain. HAL, aussi intelligent soit-il, n'a jamais été en situation de dépasser sa propre condition d'ordinateur informatique. L'Homme, au contraire, à partir du moment où il a touché le monolithe, s'est distingué des autres singes.
Bien sûr, RoboCop est avant tout un film d’action mais c'est aussi une œuvre de science-fiction qui questionne si RoboCop est humain? Est-il un cyborg très perfectionné ou simplement un robot, une machine? Cette question nous plonge au cœur de l’anthropologie philosophique qui postule que l’être humain ne se réduit pas à son corps (en particulier à son cerveau), mais est composé en plus d’une conscience immatérielle.
La grande question de Ghost in the Shell est : comment se faire un corps ? La dissociation de l’esprit et du corps est le prétexte de la fiction, mais tout le travail du film est de les réunir. L’histoire d’amour entre le cyborg et l’intelligence artificielle intègre le ghost au shell, elle permet à Motoko de trouver l’unité de son corps et de son cerveau. L'auteur pense l’humain comme être de parole et comme être de désir, inséparablement.
Dans Dark City, les êtres de l'espace se plaisent à interchanger les souvenirs d'un individu à l'autre afin de découvrir qu'est-ce qui fait l'essence de l'humanité. Dans The Giver de Philip Noyce, Après une guerre qui a failli amener la fin de l’espèce humaine, l’humanité est repartie sur de nouvelles bases. Tout souvenir du passé a été supprimé, de même que les émotions. Le contrôle de la population par l’oubli ou la suppression des émotions ont été largement traités dans des romans tels que Farenheit 451 de Ray Bradbury, Un Bonheur Insoutenable d’Ira Levin ou Le Meilleur Des Mondes d’Aldous Huxley, ainsi que dans des films tels qu’Alphaville de Jean-Luc Godard, THX 1138 de George Lucas et même Equilibrium de Kurt Wimmer.
La science fiction et notre difficulté à évoluer
Dans la suite logique de la trilogie Mars et d’Aurora, le roman de Kim Stanley Robinson, The Ministry for the Future, propose la possibilité d’une terraformation de… la Terre. Le propos peut être résumé en trois phrases tirées du livre : « We are fucked », « There is no such thing as fate », et « The future has to succeed ». La COP29 se tient en 2025. Sur la base des articles 16 et 18 des accords de Paris pour le climat, les 108 pays signataires décident de la création d’une agence internationale, dotée d’un budget, dont le rôle est d’implémenter les décisions prises lors de la COP21 en matière de réduction des émissions carbone. En outre, l’agence se voit confier la mission de défendre les intérêts de toutes les créatures vivantes présentes ou futures. La presse lui donne alors le nom officieux de Ministère pour le Futur (Ministry for the Future). Peu après, une vague de chaleur telle que nous en connaissons de plus en plus régulièrement, mais juste un poil plus forte, frappe l’Inde et provoque la mort de 20 millions de personnes.
Dans “Don’t Look Up”, les scientifiques échouent-ils à convaincre dans leur prise de parole médiatique en étant trop alarmistes sur la fin du monde qui approche ? Pour persuader de changer d’avis sur un sujet majeur, nous savons que ce qui est dit est aussi important que la manière dont le discours est énoncé. Peut-être que les scientifiques négligent leurs propres biais cognitifs en adoptant une position de haute supériorité lorsqu’ils énoncent leur scénario comme l’évidence même : une telle position peut conduire à la défiance. Une note de réflexion à lire ici.
Pour Pascal Bruckner, l'idée de nature humaine repose sur une pure fiction. Il rappelle que le droit naturel fut inventé à partir de la Renaissance pour contrecarrer l'absolutisme monarchiste et la prégnance de l'Eglise: il s'agissait d'opposer une nature humaine à une nature divine. "Mais cette nature humaine, que l'on suppose éternelle et universelle, est, en fait, elle-même une pure création de l'Histoire. C'est l'homme tel qu'il veut se voir. Ne nous faisons pas croire que nous allons “sauver la planète”. Il serait préférable de faire preuve de davantage d’humilité et de choisir des objectifs plus mesurés, estime le romancier dans une tribune au « Monde ». Ici
La science pour analyser nos comportements
Le GIEC parle de « retombées cataclysmiques », et pourtant nos comportements n’évoluent pas suffisamment. Comment se fait-il que nous soyons à la fois conscients des enjeux écologiques et souvent incapables d’agir ? Comment se fait-il que malgré toute notre bonne volonté, on ne parvienne pas toujours à changer nos habitudes ?
Kant s'est aussi intéressé aux extraterrestres, c'est ce qu'a découvert Peter Szendy dans "Kant chez les extraterrestres". D'après lui ce qu'il s'agit avant tout d'interroger, avec ces aliens que Kant a dû prendre au sérieux comme nul autre dans l'histoire de la philosophie, ce sont les limites de la mondialisation. Lire Kant, le lire en le faisant dialoguer avec des films de science-fiction serait le faire parler des questions qui nous pressent et nous oppressent : notre planète menacée, l'écologie, la guerre des mondes… Mais c'est aussi tenter de penser, avec lui ou au-delà, ce qu'est un point de vue.
Mais comment comprendre le point de vue de ceux qui veulent « être à l’avant dans un avion qui va droit vers le crash » comme le suggère Orelsan dans sa dernière chanson « L’odeur de l’essence » ? Serions-nous irrémédiablement attirés par la catastrophe ? Si tel est le cas, celle-ci serait notre mode d’évolution, c’est-à-dire que nous ne pourrions évoluer qu’à son contact : la catastrophe nous permettrait de progresser, alors même qu’elle nous menace. Comment expliquer une telle attitude ? En effet, nous pouvons constater notre inertie individuelle et collective devant la situation environnementale actuelle. Une note de réflexion à lire ici
"Notre cerveau s’intéresse aux informations qui confirment sa vision du monde, pas à celles qui la contredisent", résume Andreas Kappes, psychologue en sciences cognitives. Ce dernier réflexe cérébral favorise la polarisation des opinions, aujourd’hui renforcée par les algorithmes des réseaux sociaux qui, en proposant des contenus liés aux préférences de leurs utilisateurs, les enferment dans une "bulle de filtres". Ici Pour tenter d’expliquer l’inertie générale face à l’urgence climatique, "Climat : mon cerveau fait l’autruche" convoque une dizaine de chercheurs de disciplines variées, des neurosciences à la philosophie en passant par la psychologie et la sociologie.
La psychologie est la science qui étudie les processus mentaux au moyen de trois dimensions: cognitive, affective et comportementale. La psychologie scientifique est née au XIXe siècle. Comparée aux mathématiques et à la physique, la psychologie est une science jeune, puisque ce n’est que dans la seconde moitié du XIXe siècle que les conditions de sa naissance ont été remplies: une méthode, un domaine, des institutions de recherche et de formation.
Les neurosciences comportementales, également connues sous les termes de psychologie biologique, biopsychologie, ou psychobiologie concernent l'application des principes de la biologie, en particulier de la neurobiologie à l'étude des processus mentaux et des comportements des humains et des animaux.
Ainsi la fresque du facteur humain se situe au croisement des connaissances issues des sciences humaines : de la psychologie aux neurosciences comportementales.
La fresque du facteur humain pour comprendre les facteurs de changement
C’est pour permettre à chacun de mieux comprendre son humanité, expliquer les facteurs inconscients de changement et de non changement de comportements que la fresque du facteur humain a été conçue.
C’est en apprenant de manière générale le fonctionnement de notre cognition que nous allons pouvoir amorcer l’évolution durable de nos comportements. C’est ce que la fresque du facteur humain propose d'expérimenter.
Le facteur humain concourt à l’obtention d’un certain résultat, selon des degrés différents. Il peut par exemple être considéré comme responsable à la fois de notre inaction et de notre action. C’est parce que nous sommes des êtres humains que nous avons parfois des difficultés à agir selon notre propre volonté. En effet, nous pouvons parfois avoir l’impression de ne pas être entièrement aux commandes, comme si quelque chose nous échappait. Nous avons envie de changer, mais nous n'y arrivons pas. Une des raisons se trouve dans des facteurs inconscients. Dans ce travail de compréhension de soi, de ce qui peut influencer la transformation de nos comportements, l’attention, la mémoire et l’émotion jouent un rôle primordial (Damasio).
En savoir plus la fresque du facteur humain : https://www.levidepoches.fr/lesupercollectif/2022/03/les-prochaines-session-de-la-fresque-du-facteurhumain-.html