Dans divers domaines, les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter sont de nouveaux outils pour la recherche scientifique. Une mine d’informations qui n’est pas toutefois pas représentative de la population mais qui fournit des données que l’on aurait du mal à collecter par les outils traditionnels.
Les données échangées sur les réseaux sociaux sont une mine d’or pour les publicitaires, mais aussi pour la recherche scientifique, notamment sociologiques. Si certains chercheurs étudient les réseaux sociaux pour ce qu’ils sont, c’est-à-dire un médium relayant des interactions entre personnes (pour étudier le langage par exemple), d’autres les utilisent pour étudier les individus qui sont derrière leur écran en fonction d’une problématique qui n’est pas forcément liée aux réseaux sociaux. Dans ce cas, ils deviennent un outil parmi d’autres.
À l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), l’épidémiologiste Guy Fagherazzi cherche à identifier les facteurs de risques des personnes diabétiques. Sur Twitter, il a un accès direct aux déclarations des patients, qui ne s’exprimeraient pas forcément de la même manière devant un médecin.
« Twitter nous permet d’avoir des données sur le comportement et les émotions des patients. Beaucoup de personnes y discutent de la maladie et des petits problèmes du quotidien. On y retrouve le stress lié à leur diabète. » La plupart des messages postés sur Twitter sont publics : on peut identifier le sexe et l’âge de la personne ainsi que son type de diabète.
Emilio Zagheni, directeur de l’institut Max-Planck pour la recherche démographique à Rostock (Allemagne), utilise les données de Facebook pour suivre les migrations et compléter les statistiques officielles. L’une de ses études suit la répartition des immigrants portoricains aux États-Unis après l’ouragan Maria, qui a ravagé l’île en 2017. « Le temps qu’un recensement officiel soit fait, la plupart des Portoricains partis aux États-Unis étaient rentrés chez eux », explique-t-il.
Lui utilise le gestionnaire de publicité de Facebook, destiné aux entreprises souhaitant atteindre certains groupes de personnes. Il a pu suivre, plusieurs mois après l’ouragan, la répartition du nombre de Portoricains par État américain. « Ce service ne regroupe pas seulement les données de Facebook, mais aussi de ses filiales comme Messenger et Instagram. »
Applications mobiles et sites Internet collectent et envoient également énormément de données à Facebook. Ce genre d’informations est utile aux démographes pour suivre l’intégration des migrants : consultent-ils des pages Internet de leur pays d’accueil ? Aiment-ils la musique locale ?
Sur Twitter, Guy Fagherazzi a trouvé des données inédites : « Parmi les personnes diabétiques américaines qui postent sur Twitter, beaucoup s’inquiètent de l’augmentation des prix de l’insuline. Ce stress peut avoir un effet sur l’état de santé général. Or, ces inquiétudes ne sont pas du tout prises en compte dans les enquêtes traditionnelles. »
Les deux chercheurs en sont conscients : l’utilisation des réseaux sociaux présente des limites. Pour les recherches d’Emilio Zagheni, le problème est que Facebook est une « boîte noire ». « Facebook ne dit pas exactement comment il agrège les « like » et les intérêts. » Autre difficulté : les réseaux sociaux ne sont pas représentatifs de la population. « Il faut faire des corrections statistiques », explique Zagheni « On ne cherche pas à avoir une vision représentative, se défend Guy Fagherazzi, mais des personnes différentes les unes des autres. » Avec ces données, des questionnaires plus complets devraient être soumis aux personnes diabétiques. À terme, le chercheur français voudrait créer un observatoire mondial en temps réel du diabète sur les réseaux sociaux.
« On ne cherche pas à avoir une vision représentative, se défend Guy Fagherazzi, mais des personnes différentes les unes des autres. » Avec ces données, des questionnaires plus complets devraient être soumis aux personnes diabétiques. À terme, le chercheur français voudrait créer un observatoire mondial en temps réel du diabète sur les réseaux sociaux.