Les salariés sont de plus en plus sensibles aux enjeux écologiques[1]. Dans le sillage du succès connu par la Fresque du Climat, y compris au sein des entreprises, un foisonnement d’initiatives de mobilisation écologique a émergé ces dernières années : des ateliers comme 2tonnes, des parcours comme Corporate for Change, des plateformes comme Lakaa, des réseaux comme Les Collectifs. Cette nouvelle étude de l’ADEME aborde la mobilisation écologique des salariés en croisant le regard de porteurs de dispositifs externes à l’entreprise, de responsables RSE et de salariés.
La première phase de ce projet a consisté à réaliser un panorama des dispositifs existants de mobilisation écologique s’adressant aux salariés des entreprises privées. Sur une trentaine de dispositifs recensés, 12 dispositifs ont été sélectionnés pour analyser leur fonctionnement. Des entretiens avec les porteurs de ces dispositifs ont permis de réaliser une analyse transversale de l’offre de mobilisation et des fiches détaillée par dispositifs.
La deuxième étape visait à rendre compte de la mobilisation écologique du point de vue de responsables RSE et salariés, pour appréhender son impact sur les entreprises. Une enquête a été menée sur une douzaine d’entreprises dans lesquelles au moins un des quatre dispositifs choisis étaient actifs. Il s’agit principalement de grandes entreprises.
« Les salariés ne se voient plus seulement comme des travailleurs, mais comme des acteurs qui participent à façonner la transformation écologique des entreprises », argumente en introduction Anaïs Rocci, sociologue à la direction exécutive prospective et recherche de l’Ademe. L’étude met sur la table le néologisme « écotafeur ». Ces travailleurs, souhaitant participer à la transition écologique par leur travail, seraient, selon l’étude, « la manifestation dans l’entreprise de ce que Bruno Latour a appelé “la nouvelle classe écologique” ».
4 principaux enseignements à retenir de cette étude
- Au travers des dispositifs étudiés la mobilisation écologique des salariés en entreprise s’apparente désormais à une action organisée de salariés « écotafeurs ». Ce néologisme signifie que la mobilisation écologique au travail se propage et touche désormais de plus larges pans de la population.
- L’initiative d’un dispositif de mobilisation peut venir de certains salariés déjà engagés sur l’écologie et en recherche de sens au travail, mais aussi de responsables qui mettent la mobilisation au cœur des enjeux RSE de l’entreprise : acculturation à la transition, appropriation locale, intégration dans les métiers…
- Le succès de la mobilisation écologique dans l’entreprise passe par l’implication de tous ses acteurs : salariés moteurs, relais ou simples participants, direction RSE, services support, fonction métiers, sites locaux, comité de Direction, managers d’équipe, syndicats… et varie selon les caractéristiques des entreprises.
- La mobilisation des salariés contribue à installer une culture partagée de la transition écologique dans l’entreprise et aide à dépasser les écogestes pour faire évoluer les pratiques métiers et l’organisation de l’entreprise. Mais elle se heurte aux enjeux du changement de modèle d’activité de l’entreprise, qui reste le pré-carré des dirigeants. Si la mobilisation écologique ne touche aujourd’hui qu’une partie de salariés, leurs aspirations doivent être mieux prises en compte pour que l’entreprise reste attractive à leurs yeux.
Ces dispositifs de mobilisation des salariés ont plusieurs effets. Ils permettent notamment de lutter contre l’éco-anxiété chez les salariés. En revanche, « cela peut également être à l’origine d’une frustration liée à lenteur des changements et au peu de soutien interne », rappelle Gaëtan Brisepierre.
Selon l’étude, ces dispositifs peuvent participer d’un changement du mode d’exercice de la RSE pour la rendre plus contributive. « La mobilisation écologique contribue aux évolutions managériales en cours dans les entreprises qui tentent de mettre à distance le modèle hiérarchique », explique l’étude.
Retrouvez la synthèse complète du rapport de projet : https://presse.ademe.fr/wp-content/uploads/2024/01/ECOTAF-synthese-globale-1.pdf